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et comment la Saxe subit-elle le contre-coup de la nouvelle révolution politique accomplie ailleurs en 1830 ? Les révolutions sont contagieuses ; la France venait d’avoir ses journée de juillet ; la Saxe voulut avoir ses journées de septembre. Leipsick et Dresde furent alors les théâtres de troubles graves : rien n’y manqua : les chants patriotiques, les réverbères brisés, les papiers publics jetés par les fenêtres, enfin la collision sanglante entre le peuple et les troupes. C’était un calque fidèle de la révolution-mère ; et pour couronner l’œuvre, les choses eurent presque le même dénomment, comme elles avaient procédé en quelque sorte de la même origine. En effet, bien qu’à son événement le roi Antoine eût proclamé les édits conciliateurs que nous avons placés à leurs dates, outre qu’il se tint ensuite dans le cercle tracé par la politique rétrograde et toute-puissante de 1815, il indisposa sans doute les Saxons par la pratique de ces vertus, dont le peuple ne voit guère que les inconvénients lorsqu’elles deviennent exclusives et ne s’allient point aux autres qualités qu’on a droit d’attendre d’un souverain. La dévotion du vieux roi tourna donc contre lui, pendant qu’un prince de sa famille eut le temps de devenir plus populaire. Le neveu d’Antoine, Frédéric-Auguste, était a la campagne, lorsque les deux grandes villes du royaume se révoltèrent contre l’autorité qui les régissait, tandis que le roi lui-même vivait retiré à Pilnitz. Le jeune prince accourut au sein de la bourgeoisie qui le réclamait, dit-on, et qui, réunie en conférences civiques, délibérait sur les garanties qu’il conviendrait de lui demander ; beaucoup de choses, au surplus : abolition des taxes les plus onéreuses, en particulier celles de police et d’excise ; réforme de l’administration communale ; extension du droit de séance et de vote dans la diète ; contrôle et publicité des comptes ; enfin réduction des dépenses du culte catholique. Dans ces circonstances, le roi se décida à accorder, en droit, ce qui existait déjà par le fait : il s’associa, sous le titre de corégent, celui que les sympathies de la classe influente du pays appelaient à gouverner. Par sa naissance, Frédéric-Auguste. ne devait succéder au roi Antoine qu’après le prince Maximilien, duc de Saxe, son père ; mais celui-ci renonça sans difficulté en faveur de son fils. À partir de ce moment, les actes du roi Antoine cessent d’être uniquement les siens : toutes les affaires soumises à l’autorité royale devant être d’abord revêtues de la sanction du corégent. Cependant l’insurrection étant apaisée, le roi et le corégent firent leur entrée à Leipsick : l’enthousiasme populaire les y escorta : le corégent, venait de promettre aux diverses députations qui étaient allé le complimenter de se consacrer à la patrie, de réformer les abus, de travailler aux changements que les institutions pouvaient réclamer. Cependant le roi passa quelques années encore dans l’exercice nominal de l’autorité royale, cce ne fut que le 6 juin 1836 qu’il mourut à Pilnitz, à l’âge de 81 ans, laissant la couronne à celui qui partageait déjà avec lui les fonctions de la Souveraineté ; le roi n’avait point d’héritiers directs. On peut remarquer qu’il était déjà fort avancé en âge a son avènement en 1827 ; il avait alors soixante-douze ans : l’histoire, en raison de cette circonstance, tempérera sans doute le jugement qu’elle portera sur ce prince. V. R-d.


ANTOINE, sicilien qui s’illustra par son courage et son dévouement. Prisonnier des Turcs pendant le siége de Négremont par Mahomet II, en 1170, Antoine mit le feu à l’arsenal de Gallopoli, et se préparait à incendier tous les vaisseaux du port, lorsqu’il fut arrêté et conduit devant le sultan, qui le fit scier par le milieu du corps. Le sénat de Venise dota la sœur de ce malheureux, et assura une pension considérable à son frère. K.


ANTOINE de Lebrixa. Voyez Nebrissensis.


ANTOINE (Nicolas). Voyez Antonio.


ANTOINE de Palerme. Voyez Panormita.


ANTOINE de Messine, l’un des plus grands peintres du 15e siècle, communément appelé en Italie Antonello, naquit à Messine en 1447 et mourut en 1496, suivant Gallo, qui se fonde, pour ces dates, sur un manuscrit de Susino, peintre du 17e siècle. Vasari en parle plus vaguement : il se contente de dire que ce maitre ne vécut que 49 ans, et alla en Flandre pour apprendre de Jean van Eyck, dit Jean de Bruges, l’art de peindre à l’huile, qui était, ajoute-t-il, inconnu en Italie. La découverte de la peinture à l’huile date de 1410, et Jean de Bruges, qui en fut, dit-on, l’inventeur, mourut en 1441. Comment se pourrait il, suivant Gallo, qu’Antonello, né en 1447, eût vu Jean de Bruges, mort six années auparavant ? L’opinion de Vasari, quoique peu déterminée, doit donc être en quelques points préférée à celle de Susino, rapportée par Gallo. Cependant les tableaux à l’huile d’Antonello portent les dates de 1474, et même de 1490. Celui que possède M. Martinengo, a Venise, est signé ainsi : Antonellus Messaneus me fecit, 1474. Dans la salle des Dix de la même ville, on en voyait un autre signé Antonius Messinensis[1]. Si ces tableaux sont véritablement d’Antonello, comment n’a-t-il vécu que 49 ans ? Il n’a pu apprendre de van Eyck l’art de peindre a l’huile qu’avant la mort de ce célèbre artiste flamand, au moins en 1441. Il avait aussi au moins dix-huit ans quand il a fait le voyage de Flandre, et, dans cette supposition, il a dû vivre 67 ans, si on se borne encore à ne reconnaître comme lui appartenant que le tableau seul de M. Martinengo, signé en 1474. Quoi qu’il en soit, on peut croire ce que rapporte Vasari, pourvu qu’on admette positivement qu’Antonello a vécu plus de 49 ans.

  1. J’ai vu dans le cabinet de M. van Rotterdam, professeur à l’université de Gand. un tableau passe depuis dans la précieuse collection de M. Florent van Ertborn, et qui porte la signature d’Antonello avec une date certaine. Voici cette signature, qui établit un fait curieux : 1444 Antonellus Massaneus me o (oles) pinx (pinxit). Tout annonce que ce tableau a été fait en Italie. après que le peintre eut quitte la Flandre, emportant avec lui le secret qu’on venait ne lui communiquer. Le sujet de ce tableau a été décrit pas M. de Koverberg dans Le Messager des Sciences et des Arts, Gand, 1824. Ce recueil contient aussi l’extrait d’une notice sur Antonello, écrite en italien par le chavalier Paccini. R-g.