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sous ses yeux des ateliers. Après la chute de Napoléon, il revint à Madrid avec Ferdinand VII, et il y reprit avec un nouveau zèle ces occupations de piété et de bienfaisance qui, dans les temps de calme et de prospérité, font le bonheur des princes et des peuples ; mais qui, dans les temps de crise et de révolution, ne sauvent pas les empires. Don Antonio est mort dans cette capitale, en avril 1817, sans laisser de postérité. ~ M-d j.


ANTONIUS MUSA. Voyez Musa.


ANTONIUS (Godefroi), jurisconsulte célèbre, né à Freudenberg en Westphalie, mort en 1618, professeur en droit, et chancelier de l’université de Giessen, dont il a été un des fondateurs. Le landgrave Louis l’estimait beaucoup et lui confia des missions importantes. Il avait, sur les droits constitutionnels de l’empereur d’Allemagne, des idées plus favorables à ce chef de l’Empire que Hermann Vulléjus, avec lequel il soutint à ce sujet une controverse. On a de lui un grand nombre de dissertations sur presque toutes les parties du droit public et civil. On en trouve le catalogue dans les Memoriæ ictorum de Witten, et dans la Hesse savante de Strieder. Ses principaux ouvrages sont : 1° Disputationes feudales 15, Marbourg, 1604, in-4o. Elles ont été réimprimées six fois ; l’édition de J. S. Stryk, Halle, 1699, in-4o, est la meilleure. 2° De Cameræ imperiatoris Jurisdictione. Ce fut cette dissertation qui l’engagea dans une dispute avec Hermann Vulléjus et qui produisit : 3° Disputatio apolog. de polestate Imperatoris legibus soluta, et Quatuor Disputationes antivullejanæ. Giessen, 1669 et 1610, in-4o. Hermann Vulléjus montra, dans cette controverse, beaucoup plus de modération que Godefroi Antonius. — Son petit-fils, J. G. Antonius, fut médecin, écrivit de Ægro nephretico malo laborante, et mourut à Giessen en 1713. S-r.


ANTONIUS PRIMUS. Voyez Primus.


ANTRACINO (Jean), médecin, né dans le 15e siècle, à Macerata, fut l’un des plus habiles praticiens de son temps. Les témoignages nombreux de ses plus illustres contemporains, recueillis par l’abbé Lancelotti dans les Memorie di Ang. Colocci, p. 72, attestent qu’il jouissait de la réputation du premier médecin de Rome. Honoré de la confiance du pape Adrien VI, il ne put cependant le tirer d’une maladie qui se compliquait avec un âge avancé. Les Romains, habitués au faste et à la prodigalité de Léon X, n’avaient pu voir l’économie un peu parcimonieuse de son successeur sans un vif sentiment de déplaisir. À la mort d’Adrien, ils suspendirent à la porte de son médecin une couronne de feuillage avec cette inscription : Liberatori Romæ S. P. Q. R. (Voy. Adrien.) Il est probable qu’Antracino fut continué par Clément VII dans la charge honorable et lucrative de médecin pontifical ; mais on est du moins certain que, sous le règne de ce pontife, il avait le titre de protomédecin de Rome. Antracino mourut vers 1530. À l’exercice de son art, il joignait la culture des lettres ; et on a de lui des poésies latines dont on vante l’élégance. Elles ont été recueillies par Bl. Palladio dans le volume intitulé : Coryciana, Rome, 1524, in-4o. Prosp. Mandosio cite Antracino dans son Theatrum archiatrum ; et l’abbé Marini lui a consacré une notice dans les Vite degli archiatri pontefici, 1, 323. W-s.


ANTRAIGUES (Emmanuel-Louis-Henri Launay, comte d’), l’un des intrigants politiques les plus célèbres de notre époque, naquit vers 1750, dans une famille noble du Vivarais, et fut élevé avec beaucoup de soins, non par l’abbé Maury, comme on l’a prétendu (ce qui était impossible, puisqu’ils étaient du même âge), mais par d’autres maîtres fort habiles de sa province. Il entra aussitôt après comme sous-lieutenant dans le régiment de Vivarais, passa comme capitaine dans celui de Piémont cavalerie, et fut bientôt obligé de quitter ce corps, à la suite d’une affaire d’honneur qu’il n’eut pas le courage de soutenir l’épée à la main. Il a dit plus tard lui-même, pour s’excuser, que ses goûts le portaient plutôt vers la carrière des lettres que vers celle des armes. D’Antraigues profita des loisirs que lui procura cette fâcheuse circonstance pour aller visiter une partie des mers de l’Archipel et la capitale de l’empire ottoman. À son retour en France, il trouva les esprits dans un état de fermentation qu’il parait avoir partagé lui-même, puisqu’on trouve dans un ouvrage qu’il publia en 1788, sous le titre de Mémoire sur les états généraux, ces phrases remarquables : « La noblesse héréditaire est le plus grand fléau que Dieu, dans sa colère, ait jamais répandu sur les humains. » « … On nous a rassasiés jusqu’au dégoût ; on a avili pour jamais ces mots si doux de règne paternel, d’enfants chéris gouvernés par un père tendre. Les ministres en ont abusé jusqu’à la niaiserie, jusqu’à la cruauté ; car est-il rien de plus vil et de plus odieux que d’employer ces mots, gages du sentiment le plus tendre, pour nous tromper, nous ruiner, nous déshonorer ? … Qui croirait que c’est le jurisconsulte Loisel qui a établi cette opinion inconsidérée autant que tyrannique : si veut le roi, si veut la loi… Ce principe sort du cloaque affreux de la plus basse flatterie et du plus effroyable despotisme. » Cet ouvrage, appuyé de tout le prestige, de toute la force de l’éloquence, peut être considéré comme un des premiers brandons jetés au milieu de la France pour opérer le vaste incendie qui l’a si longtemps dévorée. L’auteur avait pris pour épigraphe la formule employée par le justicier d’Aragon, lorsqu’il prête serment au roi, au nom des cortès : « Nous qui valons chacun autant que vous, et qui, tous ensemble, sommes plus puissants que vous, nous promettons d’obéir a votre gouvernement, si vous maintenez nos droits et nos privilèges : sinon, non. » L’ensemble de l’ouvrage n’est qu’un développement de ce texte : on y trouve tous les principes dont les conséquences imprudemment appliquées causèrent tant de désastres ; l’insurrection des peuples y est légitimée en termes positifs ; et lorsqu’un personnage fameux l’appela le plus saint des devoirs, il ne fit que reproduire une pensée qu’il avait recueillie dans ce Mémoire. « En Angleterre,