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il assista en cette qualité aux batailles d’Engen. de Moeskirck et de Hohenlinden. Après la paix de Lunéville, il commanda pendant quelques mois une brigade sous les ordres de Leclerc, qu’heureusement il ne suivit pas dans la désastreuse expédition de St-Domingue. Resté sur le continent, et employé dans la grande armée, sous les ordres de Napoléon, il eut part à la glorieuse journée d’Austerlitz, et fut presque aussitôt après envoyé en Italie pour y faire partie de l’armée qui allait envahir le royaume des Deux-Siciles au profit de Joseph Bonaparte. Obligé, pour se rendre à cette destination, de traverser les montagnes du Tyrol, Il échappa miraculeusement avec son escorte à la chute d’une avalanche. Attaque ensuite par la bande du fameux Fra-Diavolo, il lui échappa avec le même bonheur, et concourut en 1807 à la prise de Gaëte. D’autres services lui acquirent l’estime du nouveau roi, qui voulut en faire son aide de camp. Mais, comme il eût fallu pour cela quitter le service de la France, Lamarque s’y refusa. L’empereur le fit alors général de division, et le laissa dans le royaume de Naples, dont il investit bientôt (Joachim Murat en appelant Joseph au trône d’Espagne (1808). Lemarque dirigea avec succès, en cette qualité, plusieurs opérations importantes, notamment celle de Caprée, île fameuse, où Tibère avait bravé les vengeances de Rome et l’indignation du monde. Cette masse de rochers inaccessibles était défendue par une artillerie formidable et deux mille Anglais que commandait le fameux Hudson Lowe, destiné à commander plus tard une île non moins célèbre, Lamarque s’embarqua avec seize cents soldats, et, après une navigation très-aventureuse qui dura toute une nuit, il trouva enfin un point de débarquement entre d’immenses rochers, où l’on ne voyait qu’un étroit sentier qui put conduire au sommet des forts. C’est par là que les soldats de Lamarque montèrent un à un, et que sans tirer un coup de fusil, ils égorgèrent à l’arme blanche tout ce qui se trouva sur leur passage. Ils s’emparèrent ainsi du fort le plus élevé, celui de Ste-Barbe, où ils firent onze cents prisonniers. Mais la partie inférieure de l’île, la Grande-Marine. était encore au pouvoir de l’ennemi, et, pour y descendre, le danger n’était pas moins imminent que celui qu’il avait fallu braver pour s’emparer de la partie supérieure. Lamarque donne l’exemple, sa troupe le suit ; et, menacés d’un assaut, les Anglais rendent la place. Ce fait d’armes est sans nul doute un de ceux qui ont le plus honoré la valeur française. Le ministre de Joachim, Salicetti, étant venu, après la victoire, examiner les lieux, écrivit à Naples : « J’y suis, et j’y vois les Français : mais je ne puis comprendre comment ils y sont venus. » Le nouveau roi de Naples, à qui tant de valeur profitait, se montra fort reconnaissant en donnant à Lamarque un domaine considérable, mais dont il ne devait pas jouir longtemps. Peu après, le général quitta les États de Naples pour commander une division à l’armée d’Italie sous le prince Eugène Beauharnais. Cette armée, surprise au début de la campagne de 1809, essuya d’abord quelques échecs ; mais ensuite le corps de Lamarque obtint des succès décisifs à Villa-Nova, sur la Piave, et surtout à Laybach, où il enlève un camp retranché, fit cinq mille prisonniers et prit soixante-cinq pièces de canon. Lorsque l’armée d’Italie se fut réunie à celle que Napoléon commandait lui-même sur le Danube, Lamarque fut placé sous les ordres de Macdonald, et il combattit Eugendorf et à Wagram. Dans cette terrible bataille surtout il se couvrit de gloire. Bravant le feu d’une artillerie formidable, il eut quatre chevaux tués sous lui, et vit tomber sa division presque tout entière, foudroyée par les boulets de deux cents pièces de canon. La croix de grand officier de la Légion d’honneur fut la récompense de ce mémorable exploit. Aussitôt après, Lamarque fut envoyé contre les Anglais, qui avaient tenté de s’emparer d’Anvers. On se souvient que leur apparition dans l’Escaut, dont on avait eu d’abord grand’peur à Paris, ne fut ni longue ni brillante. C’est alors que le roi Murat appela encore Lamarque auprès de lui, afin que ce général l’aidât à soutenir une lutte meurtrière et difficile contre les Calabrais. Cette fois il ne put le servir bien efficacement, et, après quelques courses insignifiantes dans les Calabres, il fut envoyé en Espagne, où se continuait une guerre non moins funeste et non moins périlleuse. Les combats d’Atta-Julia, de Riponil, de Bagnolas et de la Salud ajoutèrent à sa réputation. Mais il fallut bientôt évacuer cette contrée, et ce fut lui qui commande l’arrière-garde, que l’on chargea de faire sauter les fortifications de Girone. Revenu en France à l’époque de la restauration, en 1814, il parut d’abord se soumettre franchement au gouvernement royal, et il en reçut la croix de St-Louis, mais il ne fut pas employé. Dès lors, mécontent, il se livra souvent à des plaintes amères. Ce fut lui qui dit un jour, en présence du comte de Blacas, qui le félicitait sur le repos dont il allait jouir sous la restauration, ce mot si cruellement injurieux : « Nous n’appelons pas cela du repos, c’est une halte dans la boue. » On sent que dans de pareilles dispositions Lamarque dut voir avec bien de la joie le retour de Napoléon en 1815. Il s’est beaucoup défendu d’avoir eu la moindre part aux complots qui préparèrent ce retour. Ce qu’il y a de sûr, c’est qu’il ne fut pas des derniers à aller saluer son ancien maître, et qu’il en fut parfaitement accueilli. Nommé d’abord commandant de Paris, puis d’une division sur la frontière du Nord, il fut envoyé dans l’ouest comme général en chef aussitôt que les Vendéens firent des démonstrations hostiles. Les instructions qu’il reçut en partant furent terribles et dignes tout à fait des premiers temps de la révolution. Il devait mettre à prix les têtes des prin-