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LÉRY (Jean de), voyageur, né en 1554 à la Margelle, près St-Seyne, en Bourgogne, étudiait la théologie à Genève, lorsque l’on y reçut des lettres du chevalier de Villegagnon, qui demandait qu’on lui envoyàt au Brésil, où il venait de fonder une colonie protestante, des ministres pour l’aider à répandre l’Évangile. Quatorze, tant ministres qu’étudiant, du nombre desquels était Léry, se présentèrent pour le voyage du nouveau monde. et partirent de Genève le 10 septembre 1556. Ils virent en passant l’amiral de Coligny à Chatillon-sur-Loing, et s’embarquèrent à Honfleur le 19 novembre. Leur petite flotte, composée de trois bâtiments, après avoir reconnu le cap de Frie (Frio), où l’on ne fit pas, dit Léry, aussi long séjour que l’on aurait voulu, entra le 7 mars 1557 dans le bras de mer nommé Ganabara par les sauvages, et par les Portugais Genevre, parce qu’ils le découvrirent le 1er janvier. On voit que c’est Rio-Janeiro. Villegagnon accueillit les nouveaux venus dans la petite île de Coligny, où il avait bâti un fort ; et dès le lendemain, sans égard pour leurs fatigues et pour l’excessive chaleur, il les employa à porter des pierres et de la terre au fort, et poussa la cruauté jusqu’à ne leur donner qu’une très-mauvaise nourriture. Mais le désir d’achever les édifices qui devaient servir de retraite aux fidèles et les exhortations du plus ancien ministre leur tirent supporter assez gaiement pendant un mois toutes les privations. Cependant des dissensions religieuses s’élevèrent ensuite entre les protestants et Villegagnon ; et celui-ci leur signifia l’ordre de quitter le fort. Ils se retirèrent sur le continent, à une demi-lieue de distance. La conduite arbitraire du gouverneur fit passer beaucoup de monde avec eux. Les mêmes incidents tirent, quelques années plus tard, manquer l’établissement de la colonie que les calvinistes français voulurent former dans l’Amérique septentrionale (voy. Laudonière). La crainte d’une plus grande désertion fit prendre à Villegagnon le parti de permettre aux dissidents de retourner en France. Ils s’embarquèrent donc le 4 janvier 1558, sur le Jacques, qui entra dans le port de Blavet en Bretagne après avoir échappé aux plus grands dangers et éprouvé les horreurs de la famine. On pense que Léry exerça ensuite son ministère en France, dans les environs de la Charité-sur-Loire. Contraint de se réfugier ã Sancerre en 1575, il resta dans cette ville durant le siége qu’elle soutint. La famine horrible à laquelle on y fut réduit affaiblit de nouveau sa santé, qui ne s’était jamais bien rétablie depuis son voyage ; il mourut en 1611. On a de lui : 1o Histoire d’un voyage fait en la terre du Brésil, autrement dite Amérique, Rouen, 1578, in-8o, fig. en bois ; la Rochelle, même année, édition revue et corrigée par l’auteur ; Genève, 1580, in-8o ; la Rochelle, 1585, in-8o ; Paris, 1600, in-8o. Léry avait écrit la plupart de ses mémoires en Amérique même, et, comme il le dit, d’encre du Brésil. Il les mit en ordre en 1565. Son manuscrit s’égara : un heureux hasard le lui fit recouvrer en 1576. « Voilà comme jusqu’à présent, dit-il, ce que j’avais écrit sur l’Amérique m’étant toujours échappé des mains, n’avait pu venir en lumière. » Il retoucha ensuite son livre et le traduisit en latin sous ce titre : Historia navigationis in Brasiliam, gallice scripta, nunc primum latinitate donata, Genève, 1586, in-8o ; ibid., 1594 in-8o, fig. C’est une des bonnes relations de voyages que nous ayons en français. Léry fait connaître les mœurs et les coutumes des peuples qui habitent le Brésil, les productions du pays et les établissements que les Européens venaient d’y former. Un des chapitres les plus curieux est le dix-neuvième, dans lequel il donne un dialogue en langue brésilienne, et ensuite quelques notions sur la grammaire de cette langue. « Ce qui inspire, dit Camus, de la confiance pour les observations de Léry. c’est que non-seulement il a été témoin des faits qu’il rapporte, de plus il paraît avoir pris les moyens de s’assurer de la vérité, avoir observé avec attention et l’esprit dégagé de préjugés. Il a été aidé dans ses observations sur la langue brésilienne par un interprète qui avait vécu sept ans chez les indiens, et qui savait aussi le grec ; il prétendait trouver dans la langue des Brasiliens plusieurs expressions venues du grec. » Léry déclara que tout ce qui se voit en Amérique, soit pour la façon de vivre des habitants, soit pour la forme des animaux et en général pour ce que la terre produit, est différent de ce qu’on a dans l’ancien monde. Il a fait dans ses éditions successives des augmentations et changements, et a indiqué dans l’édition latine plusieurs suppressions qui portent principalement sur des diatribes contre Thevet, et des plaintes fort étendues contre Villegagnon. La relation de Léry est insérée en latin dans le 5e volume des Grands Voyages de De Bry. Les planches que cet éditeur a jointes au texte sont pour la plupart des répétitions de celles qu’il avait déjà insérées dans la relation de Stade et ailleurs. Purchas a fait entrer le Voyage de Léry dans le tome 4 de son recueil ; il se trouve aussi dans d’autres collections. Les aventures rapportées dans son dernier chapitre, qui contient l’histoire de sa navigation pour revenir en France, l’ont fait insérer dans l’Histoire des naufrages. 2o Histoire mémorable de la ville de Sancerre, contenant les entreprises, siéges, approches, batteries, assauts et autres eforts des assiégeants ; les résistances, la famine extrême et la délivrance des assiégés, 1574, in-8o, publiée en latin sous ce titre : De Sacro-Cœsarei quod Sancerrum vocant, obsidione, fame, deditione, Historia. Heidelberg, 1576, in-8o. E—s.

LÉRY (le vicomte François-Joseph Chausse-gros de as), général français de l’arme du génie, naquit le 11 septembre 1754, d’une famille originaire d’Angleterre, et se livra dès sa jeunesse