Page:Michaud - Biographie universelle ancienne et moderne - 1843 - Tome 33.djvu/15

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Turquie, et elle revint par l’Égypte. Ces voyages, qui sont aujourd’hui devenus aciles, grâce à la création de nombreuses lignes de paquebots, présentaient bien plus de difficultés i y a vingt ans, surtout pour une femme isolée. À peine de retour à Vienne, madame Pfeiffer en répartit ; mais cette fois elle se dirigea vers le Nord ; elle se rendit dans les pays scandinaves et pénétra jusque dans l’Islande. Encouragée par ces excursions, elle résolut de faire le tour du monde. Elle s’embarqua à Hambourg au mois de juin 1846 pour le Brésil, et débarquée à Rio-Janeiro, elle s’enfonça bravement dans l’intérieur du pays, au risque d’être égorgée par les sauvages. Elle aurait voulu gagner le Pérou par la voie de terre en traversant toute la largeur du continent ; mais, après avoir couru de graves dangers, elle fut obligée de renoncer à cette entreprise, qu’il est presque impossible de réaliser. Elle se rendit à Valparaiso en doublant le cap Horn, et de là elle alla à Taïti, où elle trouva une expédition française étendant son protectorat sur les domaines de la reine Pomaré. L’intrépide touriste se rendit alors en Chine, mais ne put dépasser Canton ; elle s’embarqua pour Calcutta et s’achemina pour Bombay par la voie de terre. Il lui eût été facile de revenir en Europe par mer, mais elle n’hésita pas un instant a choisir une voie qui promettait bien plus de fatigues et de dangers. Elle prit passage pour le golfe Persique, débarqua à Bassora, et, s’acheminant sur Bagdad. joignit une caravane, et pénétra dans la Perse après des souffrances et des difficultés multipliées. Le reste de son voyage dans la Russie méridionale et la Turquie était chose facile en comparaison de ce qu’elle venait d’accomplir. Elle rentra à Vienne après trente mois d’absence. On peut croire qu’elle ne s’y arrêta que le moins possible. Dès qu’elle eut publié la relation de son voyage et qu’elle eut reçu du gouvernement une modique allocation comme encouragement, elle voulut visiter diverses régions de l’Asie et de l’Amérique qu’elle n’avait pu voir. Elle alla s’embarquer à Londres en mai 1851. Son dessein était de pénétrer dans l’intérieur de l’Afrique méridionale ; mais, débarquée au cap de Bonne-Espérance, elle trouva des obstacles qu’elle ne put surmonter, et renant immédiatement son parti, elle monta à gord d’un navire qui se rendait dans les îles de la Sonde. Arrivée à Bornéo, elle se jeta hardiment au milieu des peuplades féroces de Malais qui occupent les côtes de cette lle si peu connue encore ; seule, elle pénétra dans les régions de l’intérieur, et passa ensuite à Java, où elle trouva des’populations relativement bien plus policées. Ce n’était pas ce qu’elle demandait ; elle tenait à voir de près les sauvages les plus étrangers à toutes les idées de l’Europe. Elle alla à Sumatra rendre visite aux Battacks, tribu chez qui se maintient avec houneur et comme institution nationale la pratique PFE

de Panthropophagie. S’étant rendue aux îles Moluques, l’infatigable voyageuse trouva un navire pret à mettre à la voile pour la Californie. Elle s’empressa d’y prendre passage ; mais le pays de l’or ne lui inspira qu’une profonde répugnance ; l’avidité de cette foule tumultueuse, appartenant à toutes les nations, la grossièreté des manières la choquèrent au plus haut point. Elle partit pour le Pérou, et pour se délasser, elle gravit autant qu’il lui fut possible les sommets des pics des Cordillères, couverts de glaces éternelles. Elle se donna la satisfaction de boire aux sources du fleuve des Amazones et de s’enfoncer dans les inextricables forêts vierges de la Bolivie. Elle se transporta ensuite aux États-Unis, qui l’intéressèrent peu ; ils ressemblent trop à l’Europe. Elle alla cependant de la Nouvelle-Orléans au Canada ; elle vogua sur les grands lacs et revint par Boston à New-York. À la fin de 1854, elle rentrait à Vienne, où elle s’occupa de rédiger la relation de son second voyage autour du monde. Le public accueillit avec intérêt et curiosité ce livre rempli de faits étranges. Il va sans dire d’ailleurs que madame Pfeiffer ne séjourna pas longtemps en Autriche ; le besoin de voir du pays, de courir des dangers était trop impérieux pour qu’elle put lutter contre. L’Afrique était la seule partie du monde où elle ne se fût pas sérieusement risquée ; elle voulut l’aborder sur un des points les moins connus, les plus riches en obstacles, et en octobre 1856, el e partit pour l’tle Maurice, d’où elle passa à Madagascar. Les fièvres, qui rendent pestilentielles les côtes de cette île, atteignirent la courageuse Allemande ; elle expira au mois de mars 1857, à l’âge de 62 ans. Les relations de S88 deux Voyages autour du monde, traduites par’M. W. de Suckau, ont été publiées à Paris en 1858 et 1860, in-12. Madame Pfeiffer avait bien toutes les qualités nécessaires au touriste : courage imperturbable, finesse d’observation, sang-froid à toute épreuve, bonne humeur constante au milieu des privations et des dangers. Sa bonne foi ne saurait être révoquée en doute ; la sincérité éclate à chaque page de ses récits ; elle retrace fidèlement et sans prétention ce qu’elle a vu, ce qu’elle a fait ; elle trouve tout simple d’avoir, presque sans ressources, sans bagage, sans compagnon, parcouru trente mille lieues tout au moins. Cette femme extraordinaire restera sans doute pendant bien des siècles l’unique exemple d’un amour aussi décidé pour des entreprises extrêmement périlleuses et que bien peu d’hommes ont osé tenter. Elle avait aussi ’honneur. unique jusqu’à présent pour une personne de son sexe, | de faire partie des sociétés de géographie de Paris et de Berlin, de la société de géologie d’Amsterdam et de diverses autres associations savantes. Z-a.


PFEIFFEB (Fnánåmc-Guumauxn-Vxcton, connu sous le nom de Fasxxmm Pmrrsa), poete allemand,