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chal de Villeroi. La mème année, il passa en Italie, et se trouva au combat de Chiari. En 1702. il devint lieutenant général, et fit la guerre sous le duc de Vendôme. Il l'accompagna, entre autres, à la bataille de Luzzara et au siége de Governolo. Le commandement de Mantoue et celui de l'armée du Pô inférieur lui furent confiés pendant que le duc de Vendôme passait en Piémont. En 1704, Bezons se trouva au passage du Pô, aux sièges de Verceil, d'Ivrée et de Verrüe. La grand'croix de l'ordre de St-Louis fut la même année accordée à sa valeur. Il reçut, en 1708, le gouvernement de la ville et de la citadelle de Cambray, et alla servir en Espagne, sous le duc d'Orléans : il assista à la prise de Tortose. Nommé maréchal de France en 1709, il fut envoyé de nouveau en Espagne ; mais ses talents et ses efforts n'empêchèrent pas le général des impériaux, Stahremberg, de prendre Balaguer. Le maréchal de Bezons fut chargé, en 1711, du commandement de l'armée française en Allemagne, conjointement avec le maréchal d'Harcourt; mais cette campagne ne fut signalée par aucun événement remarquable. En 1722, il fut un des quatre cordons bleus nommés pour les offrandes à Reims, au sacre du roi Louis XV. Il était membre du conseil de régence. Il termina sa carrière longue et honorée le 22 mai 1733, à l'age de 88 ans. Il eut un frère, archevêque de Rouen, auquel il persuada de permettre que le scandaleux abbé Dubois fût ordonné dans son diocèse. S—Y.

BEZOUT (Étienne), né à Nemours, le 31 mars 1730. Obligé, par son peu de fortune, de donner des leçons particulières de mathématiques, il en cultiva les parties élevées avec une persévérance et un succès auxquels s'opposent assez ordinairement la fatigue et le dégoût que ce pénible métier cause aux jeunes gens dont il est la seule ressource. Bézout se fit connaître de bonne heure de l'académie des sciences par plusieurs mémoires[1] ; elle l'admit dans son sein en 1758, et il fut placé en 1763, par le duc de Choiseul, à la tête de l'instruction de la marine royale, comme examinateur des gardes du pavillon et de la marine. Il composa pour ces jeunes officiers un cours complet de mathématiques qui fit époque dans ce genre d'ouvrages, soit par sa clarté, soit par le degré d'élévation où la science s'y trouvait portée. Dans un grand nombre de notes, distinguées du corps de l'ouvrage par un caractère plus petit, l'auteur aborde les questions les plus difficiles : la résolution littérale des équations algébriques par une méthode uniforme, déduite de recherches profondes qu'il avait communiquées à l'académie des sciences ; la solution du problème des cordes vibrantes, à la vérité dans l'hypothèse de Taylor ; une esquisse de la solution de celui du mouvement de rotation des corps, de l'équilibre des corps flottants et de leurs oscillations, et d'autres problèmes que présente la théorie de la construction et de la manœuvre des vaisseaux. C'était sans doute alors une intéressante nouveauté que la réunion de toutes ces matières dans un cours élémentaire. On lui a reproché, avec raison, d'avoir commis quelques fautes contre l'exactitude, et d'avoir souvent négligé la rigueur des démonstrations; mais il paraît que ce défaut tenait à l'idée qu'il s'était formée de l'embarras que présente quelquefois la marche synthétique. « J'ai élagué, dit-il, ces attentions scrupuleuses qui vont jusqu'à démontrer des axiomes, et qui, à force de supposer le lecteur inepte, conduisent enfin à le rendre tel. » Cette réflexion est au moins exagérée, et ne pourrait s'appliquer tout au plus qu'à l'abus du raisonnement ; mais on sent qu'il existe entre cet abus et le défaut contraire un milieu qui, sans trop fatiguer l'attention du lecteur, conserve à la science le caractère d'exactitude qui lui est essentiel, et qui en fait un excellent exercice logique. En 1768, Bézout obtint la place d'examinateur de l'artillerie, vacante par la mort de Camus ; et bientôt il prépara pour les élèves de ce corps une édition de son cours, dans laquelle il substitua des applications tirées du service de l'artillerie à celles qui concernaient la marine. Enfin, il publia, en 1779, sa Théorie générale des équations algébriques, qui n'est qu'un traité de l'élimination des inconnues entre un nombre quelconque d'équations. On y trouve la première démonstration qui ait été donnée de la proposition fondamentale de cette théorie envisagée dans toute sa généralité. Se renfermant dans l'exercice de ses fonctions et dans la société de sa famille, Bézout mena une vie paisible, jouit d'une considération méritée et d'une réputation que les nombreuses éditions de ses cours avaient rendue populaire. Condorcet, dans l'éloge qu'il fit de ce géo- mètre, relève un trait de courage qui ne doit pas être passé sous silence. Deux aspirants de la marine à Toulon étaient malades de la petite vérole, qu'il n'avait pas eue, et cependant, pour ne pas retarder d'une année leur avancement, il alla les examiner dans leur lit, malgré le risque évident qu'il y avait de contracter une semblable maladie à un âge assez avancé. Bézout mourut le 27 septembre 1783. Ses ouvrages sont : 1° Cours de mathématiques à l'usage des gardes du pavillon et de la marine, Paris, 1764-67, 4 vol. in-8°. On y joint aussi le Traité de navigation. La dernière édition faite du vivant de l'auteur est de 1781-82. 2° Cours de mathématiques à l'usage du corps royal de l'artillerie, Paris, imprimerie royale, 1770-72, et réimprimé un grand nombre de fois. On a réuni les applications particulières au cours à l'usage de l'artillerie avec le cours à l'usage de la marine, sous ce titre : Cours complet de mathématiques à l'usage de la marine, de l'artillerie et des élèves de l'école polytechnique, 6 vol. in-8°[2]. 3° Théorie générale des équations

  1. Un des plus remarquables est celui qui a pour titre : Sur les quantités différentielles qui, n'étant pas intégrales par elles-mêmes, le deviennent néanmoins quand on leur joint des quantités de même forme qu'elles. Ca—s.
  2. Ce cours se compose des ouvrages suivants, qui tous ont été augmentés ou annotés par différents auteurs, et réimprimés séparément : 1° l’Arithmétique à l'usage de l'artillerie et de la marine, suivie du Traité des nouvelles mesures et de tables très-utiles pour la navigation, Paris, 1822, in-8° ; la même, avec des notes par Devèse, Dôle, 1822, in-8° ; la même, suivie des Principes fondamentaux de l'arithmétique, des règles nécessaires au commerce et d'un Traité des nouveaux poids et mesures, Paris, 1826, 2 parties en 4 vol. in-8°; la même, avec des notes et des tables de logarithmes, par Reynaud, ibid, 1826, in-8°. 2° la Géométrie, sous ce titre: Éléments de géométrie, trigonométrie rectiligne et trigonométrie sphérique, revue par Plauzoles, et augmentée de notes par Plessis, Paris, 1814, 1 vol. in-8°, avec 9 pl. ; la même, suivie de la Géométrie démontrée plus rigoureusement, par P. Peyrard, ibid., 3 parties en € vol, in-8°; la même, avec des notes, des Éléments de géométrie descriptive et des problèmes par Reynaud, ibid., 1824, 4 vol. in-8° avec 91 pl. 3° l’Algèbre et l'application de l'algèbre à l'arithmétique et à la géométrie, avec des notes explicatives par Reynaud, Paris, 1822, in-8°., 4° la Mécanique, Paris, an 4 (1795), 3 vol. in-8° ; la même, revue et augmentée par Garnier, ibid., an 8 (1799), 8 vol. in-8°. 5° Traité de la navigation, Paris, 1849, 4 vol. in-8°, avec 40 pl.; la même, revue et augmentée de notes et d'une section supplémentaire, etc., par M. de Rossel, ibid., 4824, 4 vol in-8° avec 40 pl. Cu—s.