Page:Michaud - Biographie universelle ancienne et moderne - 1843 - Tome 41.djvu/387

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d’Écosse, 1783. Quelques fautes échappées à l’auteur dans cet ouvrage ont aussi été rectifiées par l’académicien nommé. Il en cite d’ailleurs des anecdotes curieuses, et entre autres sur Catherine de Médicis, dont madame d’Arconville a tracé le portrait avec beaucoup d’exactitude. Elle a encore publié un traité Sur la putréfaction, in-8°, fruit de ses expériences et de ses remarques. Elle avait traduit de l’anglais le Traité de chimie de Shaw ; mais elle ne l’a point livré à la presse. Enfin elle fit tous les frais d’impression de la traduction, donnée par Sue, d’un Traité d’ostéologie du docteur Alexandre Monro, 2 vol. in-fol., avec de belles planches, 1759. Parmi les nombreux ouvrages littéraires qu’elle a traduits de l’anglais, on distingue les Mémoires de mademoiselle de Valcourt, roman d’un genre sérieux, et un autre intitulé Amynthon et Thérèse. On trouve, à la fin de la collection des Mélanges de cette dame, deux pièces de théâtre qui ne sont pas d’elle ; l’une est l’Abdolonyme de Fontenelle, et l’autre une tragédie intitulée Louis IX, composée par le secrétaire de M. Thiroux-d’Arconville. C’était un homme de lettres nommé Rossel qui, ayant entrepris à son compte l’impression des sept volumes de Mélanges dont il est ici question, avait jugé à propos d’y joindre ces deux pièces de théâtre. L—p-E.


THIROUX DE CROSNE (Louis), fils de la précédente. né à Paris le 111 juillet 1736, fut successivement avocat du roi au Châtelet, conseiller au parlement et maître des requêtes. C’est en cette dernière qualité qu’il eut, à l’âge de vingt-sept ans, la première occasion de se faire remarquer, ayant été choisi par le chancelier

Maupeou pour la révision du fameux arrèt que le parlement de Toulouse avait rendu contre la famille Calas. « Le 7 mars 1763, tout le conseil « d’État assemblé à Versailles, les ministres « d’État y assistant, le chancelier y présidant, « M. de Crosne rapporta l’affaire avec l’impartialité d’un juge, l’exactitude d’un homme parfaitement instruit et l’éloquence simple et vraie e d’un orateur homme d’État, la seule qui convienne dans une telle assemblée. » (Voltaire, Traité sur la tolérance.) Nommé adjoint à l’intendance de Rouen, en 1767, puis intendant en exercice, quelques mois après, Thiroux de Crosne porta dans cette place des lumières, du zèle et de l’activité. La Normandie et en particulier la ville de Rouen lui durent différents établissements utiles. Ce magistrat et sa femme, née la Micliodière, étaient extrêmement aimés à Rouen, où ils avaient réussi à calmer les haines entre l’ancien parlement et le parlement Maupeou. Les manières très-simples, bourgeoises même de madame de Crosne, plaisaient infiniment au commerce de toutes les classes. Thiroux de Crosne fut appelé, en 1775, à l’intendance de Lorraine ; mais il garda celle de Normandie jusqu’au 30 juillet 1785, époque où il devint lieutenant THI

général de police. Il porta dans cette grande administration, si difficile et si délicate, les mêmes bonnes intentions, les mêmes moyens. Paris lui est redevable de la destruction du cimetière des Innocents, situé au centre de la capitale, et dans lequel, depuis Philippe le Bel, on enterrait plus de trois mille cadavres par an. Il s’en exhalait des vapeurs méphitiques tellement actives qu’elles corrompaient les aliments liquides dans les maisons voisines et empoisonnaient l’atmosphère, en raison du peu de profondeur des fosses et de l’obligation où l’on était de déloger les ossements à mesure qu’il fallait faire place pour de nouvelles sépultures. Ces ossements étaient déposés ensuite dans des soubassements, tout autour d’une vaste enceinte, derrière des grilles de fer, où l’on voyait entassés les restes de plusieurs millions d’hommes. Thiroux de Crosne rendit un service signalé en exécutant, avec courage et promptitude, ce qu’avaient empêché jusqu’alors des préjugés de plus d’une espèce et la crainte du danger ui pouvait résulter d’un remuement général ; il (ht ce que n’avaient pu faire les réclamations publiques, les arrêts du parlement de Paris et le vœu de tant de magistrats. Des sommes considérables étaient indispensables pour venir à bout de cette grande opération ; le lieutenant de police les trouva dans des fonds que le gouvernement laissait à sa disposition et dont il ne devait pas rendre compte. Il obtint du clergé la destruction d’une église qui faisait partie du cimetière. Letravail entrepris en 1786, au milieu du charnier, par ordre de Thiroux de Crosne et avec les conseils des meilleurs chimistes de Paris, fit le plus grand honneur à tous ceux qui y prirent part. Le médecin Thouret (voy. son article) fut un des commissaires nommés pour y présider. Il X avait nécessité d’enlever tout ce qui existait e corps ou de débris de corps, jusqu’à la profondeur de huit à dix pieds, et d’en faire ensuite la translation. On peut lire à ce sujet la description énergique et pittoresque tracée par Mercier, dans son Tableau de Paris. L’exécution de cette grande entreprise était contiée principalement aux soins, à la vigilance et au talent des architectes Legrand et Molinos. Nul désordre, nul accident ne troublèrent l’accomplissement d’un projet si digne d’éloges (voy. Tuonaér). Du reste, Thiroux de Crosne fut jugé au total comme étant au-dessous de sa place. Il avait la représentation convenable pour un homme qui occupe un poste élevé : il était d’une grande noblesse, d’une délicatesse extrême dans tous ses procédés. Aàfant acquis de bonne heure ce que l’on appelle e l’instruction, il entendait très-bien tous les auteurs anciens ; mais des manies, des tics et souvent des questions qui paraissaient niaises à l’excès. dans sa bouche, prètaient chez lui au ridicule. Dans sa jeunesse, il avait été cependant fort goûté de la société du duc de Choiseul ; il était resté ami intime de