Page:Michaud - Le printemps d'un proscrit, 1803.djvu/78

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La jeunesse est flétrie au sortir du berceau.
Vainement la vieillesse, aux portes du tombeau,
Montre ses cheveux blancs ; et l’échafaud impie
Dévore le printemps et l’hiver de la vie.
Quand tout a succombé, vous qui craignez la mort,
Hâtez-vous : de vos cœurs bannissez le remord ;
Partagez des tyrans la lâche ignominie ;
A la honte de vivre immolez la patrie ;
Allez : dans leurs tombeaux outragez vos ayeux ;
Dénoncez vos parens, insultez à vos dieux :
Tout lien est rompu, s’il n’est illégitime ;
Les dieux sont un vain songe, et leur culte est un crime.
Au milieu des partis qui s’égorgent entr’eux,
Les empires, jouets d’un destin malheureux,
S’ébranlent, entraînés sur le torrent des âges ;
Et le monde, couvert de leurs vastes naufrages,
Echappe au joug des rois follement divisés,
Sur les débris fumans de vingt sceptres brisés.
Le sage, ami des champs, contemple du rivage,
Ces immenses débris dispersés par l’orage ;
Et, toujours calme, au sein des peuples agités,
Jouit en paix des biens que Delille a chantés.