Page:Michaud - Poujoulat - Correspondance d’Orient, 1830-1831, tome 1.djvu/159

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centaines de pas au milieu des décombres que nous nous sommes trouvés à la fois dans deux grands embarras : d’abord, comment pouvoir nous retrouver dans une ville détruite de fond en comble ? nos plans, nos souvenirs, rien ne pouvait nous guider ; si la charrue avait passé sur cette enceinte, il serait plus facile de s’y reconnaître. La seconde difficulté était de savoir où nous irions dîner ; nous n’avions pris dans la journée que le café et le sorbet hospitalier du pacha de Négrepont. Dans nos préoccupations du matin, dans nos admirations pour Athènes, nous n’avions apporté avec nous aucunes provisions. Par un rapprochement qui vous fera sourire, nous nous trouvions sur les ruines de l’ancienne Agora lorsque l’aiguillon de la faim est venu nous presser, et que nous avons commencé à sentir toute notre misère ; nous avions devant nous une table de marbre, fort bien conservée, où se trouve encore inscrit le prix des vivres et des denrées ; mais le marché était désert, nous ne voyions autour de nous que des marbres dispersés, et, pour diner à l’Agora, il aurait fallu pouvoir dire : Que ces pierres deviennent du pain. Dans cette extrémité, la providence nous a envoyé un Grec, qui à pris pitié de notre position, et nous a proposé d’aller chez le disdar, ou commandant d’Athènes qu’il connaissait beaucoup, et dont il nous a vanté les vertus hospitalières. Il nous a proposé, en outre, de nous montrer les ruines