Page:Michaud - Poujoulat - Correspondance d’Orient, 1830-1831, tome 1.djvu/430

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lissent les sources, porte le nom de Kir-joss (les quatre yeux). Les Turcs racontent que plusieurs génies viennent pleurer en ce lieu, et que les larmes qu’ils répandent foment les différentes sources que nous voyons. Cette origine du Xante n’est pas moins poétique que celle qui nous est donnée par Homère ; et lorsqu’il s’agit d’un fleuve, j’aime autant le voir descendre d’un génie qui pleure, que du dieu qui lance la foudre. Nous avons été charmés d’apprendre que les femmes de Bournarbachi ou des portes Scées vont encore laver leurs robes à la fontaine du Scamandre ; elles y vont en cérémonie, et à des jours marqués, comme les dames troyennes ; le linge et les vétemens sont portés sur des chars d’osier, semblables à ceux dont on se servait pour le même usage dans l’antique Ilion. Ainsi de pauvres villageois ont conservé une coutume qui remonte plus loin que le règne de Priam, et le hameau a gardé religieusement les souvenirs de la grande cité.

Nous avons demandé à nos visiteurs turcs si, parmi les sources du fleuve, il y avait une source chaude. Ils nous ont répondu que la première source, celle auprès de laquelle nous étions assis, n’était pas chaude en été, mais qu’en hiver, elle prenait un certain degré de chaleur, et qu’alors une vapeur légère s’élevait au-dessus du bassin. Ainsi, voilà le récit d’Homère confirmé par les paysans de Bournarbachi ; j’admire, d’après cela, la