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VUE DU MAGNE, MŒURS DES MANIOTES.

À bord du Loiret, le 7 juin 1830.

Nous sommes restés la moitié d’une journée en présence des rives du Magne ; nous avons été quelquefois assez près des côtes pour reconnaître les accidens du sol et la configuration du pays. Après avoir dépassé Calamata, on voit, à quelque distance les unes des autres, deux ou trois pauvres bourgades qui paraissent renfermer quelques centaines d’habitans puis, on aperçoit de loin en loin des villages ou corios dispersés sur le penchant des montagnes ; on les reconnaît d’abord à quelques bouquets de verdure jetés sur une terre pierreuse et stérile. Ces villages, bâtis en pierres, ont presque tous de grandes tours carrées, dont le seul aspect nous fait penser qu’on n’y est pas toujours dans une sécurité profonde. On se fait souvent la guerre d’une tour à une autre, et c’est la victoire, ou plutôt la force qui fait la loi. Si le Magne avait une histoire, il serait curieux d’y voir ce que la conquête d’un défilé, d’un rocher désert, a coûté de sang, ce que la domination d’un village ou d’une heptarchie a enfanté de discordes, a fait commettre de crimes.