Page:Michaud - Poujoulat - Correspondance d’Orient, 1830-1831, tome 2.djvu/225

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offrir à un Turc les deux tiers de ce qu’il demande, la moitié à un Grec, le tiers aux Arméniens et aux Juifs. J’ai cru remarquer que les Osmanlis n’ont point entre eux cet esprit de jalousie qu’on retrouve chez tous les marchands des autres nations. Comme je demandais un jour à un marchand turc un portefeuille un peu élégant, « Allez chez mon voisin, me dit-il, qui en a de plus beaux que moi. » Tout le monde s’accorde à dire qu’il n’y à rien de plus rare que le vol dans les bazars ; un marchand s’absente quelquefois plusieurs heures, tout est ouvert dans sa boutique, il revient et retrouve tout à sa place. Le délit de la filouterie est presque inconnu chez les Osmanlis ; il faut que le vol ait le caractère de la violence et qu’il ressemble un peu à la victoire, pour que les Turcs s’en mêlent ; aussi trouve-t-on des musulmans parmi les voleurs de grand chemin, mais jamais ou très-rarement parmi les filous et les escrocs. Ce n’est pas qu’ils n’aient grande envie d’avoir votre argent ; quand vous payez à un Turc ce qui lui est dû ou que vous lui donnez un bakchis, il a bien plutôt les yeux sur les pièces de monnaie qui vous restent que sur celles qu’il reçoit. Les marchands osmanlis ne manquent pas d’adresse pour faire passer l’argent des acheteurs dans leur bourse ; leurs manières sont quelquefois plus polies, plus engageantes que celles des Arméniens et des Grecs. J’entre souvent dans la boutique d’un gros parfumeur qui fournit, m’a-t-il dit, des