Page:Michaud - Poujoulat - Correspondance d’Orient, 1830-1831, tome 2.djvu/254

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d’un trône qui venait de faire trembler l’Afrique. Pour moi, pauvre pèlerin, que puis-je faire, si ce n’est de m’affliger et de relire votre-lettre, dans laquelle vous me racontez avec tant de bon sens, de vérité et de précision tout ce qui s’est passé[1] ; toutefois je ne me laissai point abattre, car on se trouve toujours un peu aguerri contre des révolutions qu’on a prévues, et contre des malheurs qu’on a déjà soufferts. L’abîme où nous sommes tombés, ne ressemble point encore à celui dont parle le poète, et dans lequel l’espérance n’entre pas ; je pense bien qu’à Paris on ne s’occupe guère maintenant de ce qui se passe sur le Bosphore ; je ne continuerai pas moins à vous entretenir de tout ce que j’aurai vu dans ce pays, et pour que mes récits aient quelque chose de triste comme le temps présent, je vous parlerai dans cette lettre des cimetières de StambouL.

Il n’y a rien de plus apparent dans les villes turques, après les mosquées et les minarets, que les cimetières. On ne peut entrer dans une ville ni en sortir, sans avoir sous les yeux le spectacle d’un champ des morts ; voilà pourquoi aucun voyageur n’a oublié de décrire les sépultures des musulmans. Dans nos villes chrétiennes d’Europe, on se croit obligé d’entourer les cimetières de hautes murailles,

  1. Cette lettre de M. Bazin vient d’être imprimée dans un ouvrage du jeune écrivain, intitulé l’Époque sans nom. C’est un tableau des mœurs de Pans dans les années qui viennent de s’écouler. Il est difficile de porter plus loin le talent d’observation réuni au talent d’écrire.