Page:Michaud - Poujoulat - Correspondance d’Orient, 1830-1831, tome 2.djvu/276

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Jupiter Urius. Cependant, l’entrée de l’Euxin est toujours dangereuse, et la Mer-Noire toujours féconde en naufrages. Après avoir cessé d’invoquer les dieux, on n’invoque pas même les lumières de l’expérience. Il n’existe pas une carte complète de la Mer-Noire pour diriger la marche des navigateurs, et la Porte n’a point voulu jusqu’ici qu’on fît dans ces parages des observations nautiques ; il lui semble que les écueils et les abîmes de l’Euxin lui en assurent la possession ; ils sont plus redoutables en effet que tous ces châteaux élevés sur les rives du Bosphore. Les obstacles et les périls n’arrêtent pas néanmoins les navires d’Europe qui, chaque année, s’en vont labourer en tous sens cette mer orageuse ; ils trouvent sur les rivages de l’Euxin des cités que l’antiquité ne connaissait point, et reviennent chargés de blés, de bois de construction, de laines, de pelleterie, et des plus riches productions de la Crimée, de la Géorgie et de l’Asie-Mineure. Nous sommes dans la saison où les vaisseaux descendent de la Mer-Noire. Je vois flotter tous les pavillons du monde, excepté celui des Ottomans. Parmi cette foule de navires qui passent, je salue quelques pavillons blancs ; ces pavillons blancs viennent d’un rivage où la renommée n’a point encore porté la nouvelle de la révolution française, d’un pays où personne ne parle de nos malheurs : n’aimeriez-vous pas à vivre dans ce pays-là ?


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