Page:Michaud - Poujoulat - Correspondance d’Orient, 1830-1831, tome 2.djvu/339

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si j’avais été peintre, je n’aurais pas manqué cette occasion de faire un beau tableau.

Gardez-vous long-temps vos prisonniers ? ai-je dit au geôlier. — On ne fait guère que passer dans cette prison comme dans un caravansérail. — J’avais lu dans les livres qu’en Turquie le juge est obligé de donner une attention particulière aux détenus, et d’examiner les motifs de leur détention. Les livres ajoutent que lorsque les preuves ne sont pas complètes, ou que les poursuites contré un accusé restent en suspens, le magistrat turc doit faire publier, par un hérault, son état d’emprisonnement ; s’il se présente des plaignans, l’instruction recommence, mais si au bout de quelques jours personne ne s’est présenté, le prisonnier est renvoyé sous caution. Le geôlier que j’ai interrogé là-dessus m’a répondu qu’il n’avait jamais entendu parler de tout cela. — J’ai cependant lu dans Mouradja-d’Ohson, lui ai-je dit, que la règle générale en Turquie, veut que personne ne puisse rester plus de trois jours en prison sans être jugé. — À ces paroles transmises par mon interprète, le geôlier m’a regardé avec une sorte de dédain ; j’ai pensé alors que toutes les législations du monde ont un beau idéal qu’il faut bien se garder de prendre à la lettre, et que les lois de chaque pays ont leur côté trompeur, je dirai presque leur hypocrisie, comme notre pauvre humanité. Les belles maximes que j’avais rappelées au geôlier ont pu être quelquefois