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SAINTE-BEUVE.

Pendant près de deux années, il ne prit aucune part aux débats de la haute assemblée et à peine une part discrète à ses travaux. Mais, le 25 mars 1867, le comte de Ségur d’Aguesseau ayant rappelé pour la blâmer la nomination de Renan au Collège de France, Sainte-Beuve se leva et l’interrompit vivement. Il y eut du tapage. Menacé d’un rappel à l’ordre pour son interruption, Sainte-Beuve voulut prendre sa revanche. Il se fît donner la parole peu après (29 juin), sur un sujet qui lui permit de soutenir les mêmes idées : une délibération sur les ouvrages à admettre dans les bibliothèques populaires et sur ceux qu’il en fallait exclure. Il défendit « le droit d’examen et de libre opinion », fit l’apologie de Voltaire, de Jean-Jacques, de Proudhon, de Michelet, de Renan, de George Sand et autres auteurs proscrits ; puis, « élargissant le cercle de la discussion », il invita le gouvernement à ne pas favoriser exclusivement les tendances conservatrices, à ne pas « laisser entamer les droits acquis par la Révolution » : « L’Empire, conclut-il, a une droite et une gauche : à gauche est le cœur. » Le 4 mai 1868, il parla encore à propos de la loi sur la presse et, tout en la votant comme réalisant un progrès, se plaignit qu’elle ne fût pas assez libérale. Ce n’est pas le libéralisme qui l’inspirait, — du moins si l’on prend ce mot dans son sens étymologique, — quand il combattit, le 19 mai, la pétition qui demandait la liberté de l’enseignement supérieur. Il y prit la défense de l’Ecole de Médecine de Paris accusée de « tendances matérialistes ». Mais, cette fois encore, il élargit le cercle de la discussion. Il