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§ II.


De la conservation et distinction des ordres politiques.


C’est l’esprit des gouvernements aristocratiques que les liaisons de parenté, les successions, et par elles les richesses, et avec les richesses la puissance, restent dans l’ordre des nobles. Voilà pourquoi vinrent si tard les lois testamentaires. Tacite nous apprend qu’il n’y a point de testament chez les anciens Germains. A Sparte, le roi Agis, voulant donner aux pères de famille le pouvoir de tester, fut étranglé par ordre des éphores, défenseurs du gouvernement aristocratique[1].

Lorsque les démocraties se formèrent, et ensuite les monarchies, les nobles et les plébéiens se mêlèrent au moyen des alliances et des successions par testament, ce qui fît que les richesses sortirent peu à peu des maisons nobles. Quant au droit des mariages solennels, nous avons déjà prouvé que le peuple romain

  1. Qu’on voie par là si les commentateurs de la loi des Douze Tables ont été bien avisés de placer dans la onzième l’article suivant, Auspicia incommunicata plebi sunto. Tous les droits civils, publics et privés étaient une dépendance des auspices et restaient le privilège des nobles. Les droits privés étaient les noces, la puissance paternelle, la suite, l’agnation, la gentilité, la succession légitime, le testament et la tutelle. Après avoir, dans les premières tables, établi les lois qui sont propres à une démocratie (particulièrement la loi testamentaire) en communiquant tous ces droits privés au peuple, ils rendent la forme du gouvernement entièrement aristocratique par un seul article de la onzième table. Toutefois, dans cette confusion, ils rencontrent par hasard une vérité, c’est que plusieurs coutumes anciennes des Romains reçui’ent le caractère de lois dans les deux dernières tables, ce qui montre bien que Rome fut dans les premiers siècles une aristocratie. (Vico.)