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COMME JADIS…

à y puiser. L’héritage de gloire n’existe pas chez-nous, comme il est compris chez-vous. Dans notre jeune pays de démocratie, chacun vaut par soi. Être la petite-fille du Chevalier Pierre de Lavernes ne signifie rien, ici ; mais quelle fierté intime je ressens lorsque, au cours d’une lecture, je trouve une allusion au « Gentilhomme, écrivain ». Si vous vouliez stigmatiser les mœurs de votre temps, pourquoi, Monsieur, n’avoir pas fait œuvre personnelle de votre plume ?

Votre talent de peintre m’a été révélé, il y a longtemps déjà, par des reproductions et des articles de critique publiés dans une revue française. Mon père aimait à me dire : « Celui-là est un cousin à nous ; il porte jusqu’au prénom du héros des Plaines d’Abraham. On le sent resté de bonne race… » Et nous lisions les noms de vos tableaux ; « La moisson en Beauce », « L’église d’Ormoy », « La vallée de la Juine »… Tout cela nous semblait moins éloigné, presque vu, parce que vous portiez un nom familier à nos lèvres. Naïvement, je vous rattachais à ce Gérard de Noulaine, jusqu’à vous confondre avec lui dans mon esprit. De l’autre bout du monde, dans le coin perdu, à peine civilisé par les premiers défrichements où je vis, je m’intéressais à vos travaux parce que vous étiez un peu nôtre, parce que je vous croyais de notre tradition L’arrivée de votre Roman d’antan, quel coup !…

J’avais pris la plume pour vous remercier