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HISTOIRE DE FRANCE.

le druidisme semblait devoir comprimer, avait repris vigueur ; seulement la différence des forces avait établi une sorte de hiérarchie entre les tribus ; certaines étaient clientes des autres, comme les Carnutes des Rhêmes, les Sénons des Édues, etc. (Chartres, Reims, Sens, Autun).

Des villes s’étaient formées, espèces d’asiles au milieu de cette vie de guerre. Mais tous les cultivateurs étaient serfs, et César pouvait dire : Il n’y a que deux ordres en Gaule, les druides et les cavaliers (equites). Les druides étaient les plus faibles. C’est un druide des Édues qui appela les Romains.

J’ai parlé ailleurs de ce prodigieux César et des motifs qui l’avaient décidé à quitter si longtemps Rome pour la Gaule, à s’exiler pour revenir maître. L’Italie était épuisée, l’Espagne indisciplinable ; il fallait la Gaule pour asservir le monde. J’aurais voulu voir cette blanche et pâle figure, fanée avant l’âge par les débauches de Rome, cet homme délicat et épileptique, marchant sous les pluies de la Gaule, à la tête des légions, traversant nos fleuves à la nage ; ou bien à cheval entre les litières où ses secrétaires étaient portés, dictant quatre, six lettres à la fois, remuant Rome du fond de la Belgique, exterminant sur son chemin deux millions d’hommes[1] et domptant en dix années la Gaule, le Rhin et l’Océan du Nord (58-49).

Ce chaos barbare et belliqueux de la Gaule était une superbe matière pour un tel génie. De toutes parts,

  1. Onze cent quatre-vingt-douze mille hommes avant les guerres civiles. (Pline.)