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HISTOIRE DE FRANCE.

ses ennemis. Les dévoués antiques de l’Aquitaine et de la Germanie, les sectateurs des Hassassins, qui, sur un signe de leur chef, allaient en aveugle tuer ou mourir, se retrouvent dans les serviteurs de Frédégonde. Elle-même, belle et homicide, tout entourée de superstitions païennes[1], nous apparaît comme une Walkirie Scandinave. Elle suppléa par l’audace et le crime à la faiblesse de la Neustrie, fit à ses puissants rivaux une guerre de ruse et d’assassinats, et sauva

  1. Une affranchie, possédée de l’esprit de Python, riche, vêtue d’habits magnifiques, se réfugie auprès de Frédégonde. (Greg. Tur. l. VII, cxliv.) — Claudius promet à Frédégonde et à Gontran de tuer Eberulf, meurtrier de Chilpéric, dans la basilique de Tours : « Et cum iter ageret, et consuetudo est barbarorum, auspicia intendere cœpit. Simulque interrogare multos si virtus beati Martini de præsenti manifestaretur in perfidis. » c. xxix.

    Le paganisme est encore très-fort à cette époque. Dans un concile où assistèrent Sonnat, évêque de Reims, et quarante évêques, on décide : « Que ceux qui suivent les augures et autres cérémonies païennes, ou qui font des repas superstitieux avec des païens, soient d’abord doucement admonestés et avertis de quitter leurs anciennes erreurs ; que s’ils négligent de le faire, et se mêlent aux idolâtres et à tous ceux qui sacrifient aux idoles, ils soient soumis à une pénitence proportionnée à leur faute. » Frodoart, l. II, c. v. — Dans Grégoire de Tours (l. VIII, c. xv), saint Wulfilaïc, ermite de Trêves, raconte comment il a renversé (en 585) la Diane du lieu et les autres idoles. — Les conciles de Latran, en 402, d’Arles, en 452, défendent le culte des pierres, des arbres et des fontaines. On lit dans les canons du concile de Nantes, en 658 : « Summo decertare debent studio episcopi et eorum ministri, ut arbores dæmonibus consacratæ quas vulgus colit, et in tenta veneratione habet ut nec ramum nec surculum inde audeat amputare, radicitus exsindantur atque comburantur. Lapides quoque quos in ruinosis, locis et silvestribus dæmonum ludificationibus decepti venerantur, ubi et vota vovent et deferunt, funditus effodiantur, atque in tali loco projiciantur, ubi nun-