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HISTOIRE DE FRANCE.

nombre chaque jour. Les grands seuls, leudes et évêques, se fortifiaient et s’affermissaient. Le pouvoir devait passer à celui qui réunirait les caractères de grand propriétaire et de chef des leudes. Il fallait de plus que tout cela se rencontrât dans une grande famille épiscopale, dans une famille ostrasienne, c’est-à-dire amie de l’Église, amie des barbares. L’Église, qui avait appelé les Francs de Clovis contre les Goths, devait favoriser les Ostrasiens contre la Neustrie, lorsque celle-ci, sous un Ébroin, organisait un pouvoir laïque, rival de celui du clergé.

La bataille du Testry, cette victoire des grands sur l’autorité royale, ou du moins sur le nom du roi, ne fit qu’achever, proclamer, légitimer la dissolution. Toutes les nations durent y voir un jugement de Dieu contre l’unité de l’Empire. Le Midi, Aquitaine et Bourgogne, cessa d’être France, et nous voyons bientôt ces contrées désignées, sous Charles Martel, comme pays romains ; il pénétra, disent les chroniques, jusqu’en Bourgogne. À l’est et au nord, les ducs allemands, les Frisons, les Saxons, Suèves, Bavarois, n’avaient nulle raison de se soumettre au duc des Ostrasiens, qui peut-être n’eût pas vaincu sans eux. Par sa victoire même, Pépin se trouva seul. Il se hâta de se rattacher au parti qu’il avait abattu, au parti d’Ébroin, qui n’était autre que celui de l’unité de la Gaule ; il fit épouser à son fils une matrone puissante, veuve d’un dernier maire, et chère au parti des hommes libres. Au dehors, il essaya de ramener à la domination des Francs les tribus germaniques qui s’en étaient affranchies, les Frisons au nord, au