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HISTOIRE DE FRANCE.

debout dans cet affaissement commun de l’Occident, faibles, mais les moins faibles de toutes, les Aquitains et les Francs d’Ostrasie. Ces derniers devaient vaincre ; plus unis que les Saxons, moins fougueux, moins capricieux que les Aquitains, ils étaient mieux disciplinés que les uns et les autres. « Il semble, dit M. de Sismondi (t. II, p. 267), que les Francs avaient conservé quelque chose des habitudes de la milice romaine, où leurs aïeux avaient servi si longtemps. » C’étaient en effet les plus disciplinables des barbares, ceux dont le génie était le moins individuel, le moins original, le moins poétique[1], Les soixante ans de guerres qui remplissent les règnes de Pépin et de Charlemagne offrent peu de victoires, mais des ravages réguliers, périodiques ; ils usaient leurs ennemis plutôt qu’ils ne les domptaient, ils brisaient à la longue leur fougue et leur élan. Le souvenir le plus populaire qui soit resté de ces guerres, c’est celui d’une défaite, Roncevaux. N’importe, vainqueurs, vaincus, ils faisaient des déserts, et dans ces déserts ils élevaient quelque place forte[2], et ils poussaient plus loin ; car on commençait à bâtir. Les barbares avaient bien assez cheminé ; ils cherchaient la stabilité ; le monde s’asseyait, au moins de lassitude.

  1. Ceci est très-frappant dans leur jurisprudence. Ils adoptent presque indifféremment la plupart des symboles dont chacun est propre à chaque tribu germanique. Voy. Grimm.
  2. Fronsac (Francicum ou Frontiacum) en Aquitaine. (Eginh. Annal., ap. Scr. Fr., V. 201) ; et en Saxe, la ville que les chroniques désignent sous le nom de Urbs Karoli (Annal. Franc, ibid., p. 11), un fort sur la Lippe (p. 29), Ehresburg, etc.