Page:Michelet - La femme.djvu/17

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goûts de fidélité, qui voudrait aimer la même, préfère infiniment une personne dépendante, douce, obéissante, qui, ne se croyant aucun droit, pouvant être quittée demain, ne s’écarte d’un pas et veut plaire.

La forte et brillante personnalité de nos demoiselles qui, trop souvent prend l’essor le lendemain du mariage, effraye le célibataire. Il n’y a pas à plaisanter, la Française est une personne. C’est la chance d’un bonheur immense, mais parfois d’un malheur aussi.

Nos excellentes lois civiles (qui sont celles de l’avenir, et vers qui gravite le monde) n’en ont pas moins ajouté à cette difficulté inhérente du caractère national. La Française hérite et le sait, elle a une dot et le sait. Ce n’est pas comme en certains pays voisins où la fille, si elle est dotée, ne l’est qu’en argent (fluide qui file aux affaires du mari). Ici elle a des immeubles, et même quand ses frères veulent lui en donner la valeur, la jurisprudence s’y oppose et la maintient riche en immeubles, garantis par le régime dotal, ou certaines stipulations. Cette fortune le plus souvent est là qui subsiste. Cette terre ne s’envole pas, cette maison ne s’écroule pas ; elles restent pour lui donner voix au chapitre, lui maintenir une personnalité que n’ont guère l’Anglaise ou l’Allemande.