Page:Michelet - La femme.djvu/274

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Dès que tu riais, tout riait. Ta folâtre gaieté, ta fraîche jeune voix, ta bonté à faire tous heureux, cela faisait un paradis, une maison de béatitude. Tout était amour, indulgence ; tous étaient enhardis de toi… Car ton père et ta mère n’avaient pas le courage de gronder les enfants, ni nous… Le chien le savait bien, à certaines heures, que tout était permis. Le chat le savait bien. À tels moments d’effusion, au dessert de famille, nous nous glissions, nous étions de la fête… Et tes oiseaux venaient, battant des ailes, cueillir à ta lèvre un baiser. »




La femme est née pour la souffrance. Chacun des grands pas de la vie est pour elle une blessure. Elle croît pour le mariage ; c’est son rêve légitime. Mais cette vita nuova, c’est l’arrachement de son passé. Pour donner à l’amour l’infini du plaisir, il faut qu’elle souffre en sa chair. Combien plus, grand Dieu ! quand bientôt l’autre époux, l’autre amant, l’enfant, plus cruel, du fond de ses entrailles, reviendra déchirer son sein !… Est-ce tout ? nos aïeux eurent ce proverbe sombre : « Mal de mère dure longtemps ! » Mère voulait dire matrice, et le sens du proverbe, c’est que la pauvre femme,