Page:Michelet - La femme.djvu/304

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.

en sortant le matin : « Que fera ma chère solitaire, la moitié de mon âme, qui va m’attendre bien des heures ? que lui rapporterai-je qui l’intéresse et la nourrisse ? C’est de moi qu’elle attend sa vie. » Songe à cela, ne rapporte jamais, comme font beaucoup, la lie du jour, le résidu amer du non-succès. Toi, tu es soutenu par l’agitation du combat, la nécessité de l’effort, ou l’espoir de mieux faire demain ; mais, elle, cette pauvre âme de femme, si tendre à ce qui vient de toi, elle recevrait bien autrement le coup, elle en garderait la blessure, en languirait longtemps. Sois jeune et fort pour deux ; rentre sérieux si la situation est sérieuse, mais jamais triste. Épargne, épargne ton enfant.

Ce qui la soutiendra le plus, c’est que tout bonnement tu l’associes à ton métier. Cela est praticable dans beaucoup de carrières. On restreint beaucoup trop le cercle de celles où peut entrer la femme. Plusieurs sans doute lui sont plus difficiles. Il y faut de l’effort, du temps et de la volonté. Nul temps mieux employé. Quel admirable compagnon, quel utile associé ! Combien les choses y gagnent, combien le cœur, le bonheur domestique ! Être un, c’est la vraie force, le repos et la liberté.

Elle veut travailler avec toi. Eh bien ! prends-la au mot, n’y mets pas les ménagements de la petite galanterie, mais l’amour fort, profond. Sache qu’à