Page:Michelet - La femme.djvu/341

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Elle était extrêmement belle, et de cœur plus belle encore. Elle avait un sens moral élevé, mais fort sérieux, qui lui faisait sentir peu ces capricieuses lueurs. Elle avait, pour s’y confirmer, l’amitié… non, l’adoration d’une femme adorable elle-même. En présence de ce couple si uni et si parfait, le mari pouvait-il tenir ? Il n’y venait pas en tiers. Ses qualités fines et flottantes, mêlées de défauts exquis qui marquent quelquefois les génies de la décadence, n’allaient guère à la ligne droite sur laquelle on les appliquait. Les deux amies, vertueuses, pures et transparentes comme la lumière à midi, goûtaient médiocrement la grâce indécise et sensuelle, le fuyant crépuscule.

Cette indécision augmenta. Il avait un tort bien grave ; c’était de ne pas croire en lui. Ses amis y avaient foi, le sommaient de tenir parole. Mais rien ne supplée à l’appui intérieur. La femme est le grand arbitre, le souverain juge. Il s’en fût tiré mieux peut-être avec une femme vulgaire. Celle-ci, par sa noble beauté, par sa pureté candide, par ses talents estimables, commandait trop de respect. Cette perfection excessive ne laissait guère la voie d’appel contre ses jugements. Jugements toujours bienveillants, mais sincères.

Cet homme singulier et charmant ne pouvait rien qu’à l’aveugle. Il fallait que la main aimée, lui ban-