Page:Michelet - La femme.djvu/46

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réunissant les dépenses probables de l’homme marié et celles du célibataire qui continuerait le café, le spectacle, etc. C’est ainsi qu’un de mes amis, un des plus spirituels journalistes de Paris, trouvait que pour vivre deux, sans domestique, dans une maisonnette de banlieue, il faut trente mille livres de rente.

Cette lamentable vie, d’honorable solitude, et d’ennui désespéré, c’est celle que mènent les ombres errantes qu’on appelle en Angleterre les membres de clubs. Cela commence aussi en France. Fort bien nourris, fort bien chauffés, dans ces établissements splendides, trouvant là tous les journaux et de riches bibliothèques, vivant ensemble comme des morts bien élevés et polis, ils progressent dans le spleen, et se préparent au suicide. Tout est si bien organisé que la parole est inutile ; il n’est même besoin de signes. À tels jours de l’année, le tailleur se présente, et prend mesure, sans qu’on ait besoin de parler. Point de femme. Et encore moins irait-on chez une fille. Mais, une fois par semaine, une demoiselle apportera des gants, ou tel objet payé d’avance, et sortira sans bruit au bout de cinq minutes.