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HISTOIRE DE FRANCE

maigrirent et pâlirent ; les pauvres rongèrent les racines des forêts ; plusieurs, chose horrible à dire, se laissèrent aller à dévorer des chairs humaines. Sur les chemins, les forts saisissaient les faibles, les déchiraient, les rôtissaient, les mangeaient. Quelques-uns présentaient à des enfants un œuf, un fruit, et les attiraient à l’écart pour les dévorer. Ce délire, cette rage alla au point que la bête était plus en sûreté que l’homme. Comme si c’eût été désormais une coutume établie de manger de la chair humaine, il y en eut un qui osa en étaler à vendre dans le marché de Tournus. Il ne nia point, et fut brûlé. Un autre alla pendant la nuit déterrer cette même chair, la mangea, et fut brûlé de même. »

« … Dans la forêt de Mâcon, près l’église de Saint-Jean de Castanedo, un misérable avait bâti une chaumière, où il égorgeait la nuit ceux qui lui demandaient l’hospitalité. Un homme y aperçut des ossements, et parvint à s’enfuir. On y trouva quarante-huit têtes d’hommes, de femmes et d’enfants. Le tourment de la faim était si affreux que plusieurs, tirant de la craie du fond de la terre, la mêlaient à la farine. Une autre calamité survint : c’est que les loups, alléchés par la multitude des cadavres sans sépulture, commencèrent à s’attaquer aux hommes. Alors les gens craignant Dieu ouvrirent des fosses, où le

    1003-1008, famine et mortalité. — 1010, famine, mal des ardents, mortalité. — 1027-1029, famine (anthropophages). — 1031-1033, famine atroce. — 1035, famine, épidémie. — 1045-1046, famine en France et en Allemagne. — 1053-1058, famine et mortalité pendant cinq ans. — 1059, famine de sept ans, mortalité.