Page:Michelet - OC, Histoire de France, t. 2.djvu/180

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.
170
HISTOIRE DE FRANCE

maison de la sagesse ; immense et ténébreux atelier de fanatisme et de science, de religion et d’athéisme[1]. La seule doctrine certaine de ces protées de l’islamisme, c’était l’obéissance pure. Il n’y avait qu’à se laisser conduire ; ils vous menaient par neuf degrés de la religion au mysticisme, du mysticisme à la philosophie, au doute, à l’absolue indifférence. Leurs missionnaires pénétraient dans toute l’Asie, et jusque dans le palais de Bagdad, inondant le califat des Abassides de ce dissolvant destructif. La Perse était préparée de longue date à le recevoir. Avant Karmath, avant Mahomet, sous les derniers Sassanides, des sectaires avaient prêché la communauté des biens et des femmes, et l’indifférence du juste et de l’injuste.

Cette doctrine ne porta tout son fruit que quand elle fut replacée dans les montagnes de la vieille Perse, vers Casbin, au lieu même d’où sortirent les anciens libérateurs, le forgeron Kawe, avec son fameux tablier de cuir, et le héros Feridun, avec sa massue à tête de buffle. Ce protestantisme mahométan, porté au milieu de ces populations intrépides, s’y associa avec le génie de la résistance nationale, et leur enseigna un exécrable héroïsme d’assassinat. Ce fut d’abord un certain Hassan-ben-Sabah-Homairi, rejeté des Abassides et des Fatemites, qui s’empara, en 1090, de la forteresse d’Alamut (c’est-à-dire Repaire des vautours) ; il l’appela dans son audace la Demeure de la fortune. Il y fonda une association dont le fatemisme était le masque, mais

  1. App. 64.