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HISTOIRE DE FRANCE

four, personne n’a osé venir. » — « Eh bien ! dit l’empereur, si vous n’avez pas encore trouvé d’ennemi, voici le temps où vous n’en manquerez pas[1]. »

Les voilà dans l’Asie, en face des cavaliers turcs. La lourde masse avance, harcelée sur les flancs. Elle se pose d’abord devant Nicée. Les Grecs voulaient recouvrer cette ville ; ils y menèrent les croisés. Ceux-ci, inhabiles dans l’art des sièges, auraient pu, avec toute leur valeur, y languir à jamais. Ils servirent du moins à effrayer les assiégés, qui traitèrent avec Alexis. Un matin, les Francs virent flotter sur la ville le drapeau de l’empereur, et il leur fut signifié du haut des murs de respecter une ville impériale[2].

Ils continuèrent donc leur route vers le midi, fidèlement escortés par les Turcs, qui enlevaient tous les traîneurs. Mais ils souffraient encore plus de leur grand nombre. Malgré les secours des Grecs, aucune provision ne suffisait, l’eau manquait à chaque instant sur ces arides collines. En une seule halte, cinq cents personnes moururent de soif. « Les chiens de chasse des grands seigneurs, que l’on conduisait en laisse, expirèrent sur la route, dit le chroniqueur, et les faucons moururent sur le poing de ceux qui les portaient. Des femmes accouchèrent de douleur ; elles restaient toutes nues sur la plaine, sans souci de leurs enfants nouveau-nés[3]. »

Ils auraient eu plus de ressources s’ils eussent eu de la cavalerie légère contre celle des Turcs. Mais que

  1. Anne Comnène.
  2. App. 69.
  3. Albert d’Aix.