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HISTOIRE DE FRANCE

Ce fut une grande douleur pour Henri que sa proie eût échappé. Il mit au moins la main sur ses biens, il partagea sa dépouille ; il bannit tous ses parents en ligne ascendante et descendante, les chassa tous, vieillards, femmes enceintes et petits enfants. Encore exigeait-on d’eux au départ le serment d’aller se montrer dans leur exil à celui qui en était la cause. L’exilé les vit en effet, au nombre de quatre cents, arriver les uns après les autres, pauvres et affamés, le saluer de leur misère et de leurs haillons ; il fallut qu’il endurât cette procession d’exilés. Par-dessus tout cela, lui arrivaient les lettres des évêques d’Angleterre, pleines d’amertume et d’ironie. Ils le félicitaient de la pauvreté apostolique où il était réduit ; ils espéraient que ses abstinences profiteraient à son salut. Ce sont les consolations des amis de Job.

L’archevêque accepta son malheur, et l’embrassa comme pénitence. Réfugié à Saint-Omer, puis à Pontigny, couvent de l’ordre de Cîteaux, il s’essaya aux austérités de ces moines[1]. De là il écrivit au pape, s’accusant d’avoir été intrus dans son siège épiscopal, et déclarant qu’il déposait sa dignité. Alexandre III, réfugié alors à Sens, avait peur de prendre parti, et de se mettre un nouvel ennemi sur les bras. Il condamna plusieurs articles des constitutions de Claren-


    mur in Domino ad invicem. » Et impleta sunt domus et atria circumquaque discumbentium.

  1. « Il portait le cilice et se flagellait. Il obtint d’un frère qu’outre le repas délicat qu’on lui servait, il lui apportât secrètement la pitance ordinaire des moines, et il s’en contenta à l’avenir. Mais ce régime, si contraire à ses habitudes, le rendit bientôt assez grièvement malade. » (Vita quadrip.)