Page:Michelet - OC, Histoire de France, t. 2.djvu/366

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.
356
HISTOIRE DE FRANCE

vais trouver un acheteur[1]. » D’une mer à l’autre, dit un contemporain, l’Angleterre se trouva pauvre[2]. Il fallut pourtant trouver de l’argent pour payer l’énorme rançon exigée par l’empereur. Il en fallut encore lorsque Richard, de retour, voulut guerroyer le roi de France. Tout ce qu’il avait vendu à son départ, il le reprit sans rembourser les acheteurs. Après avoir ruiné le présent, il ruinait l’avenir. Dès lors il ne devait plus se trouver un homme qui voulût rien prêter ou acheter au roi d’Angleterre. Son successeur, bon ou mauvais, habile ou inhabile, se trouvait d’avance condamné à une pauvreté irrémédiable, à une incurable impuissance.

Cependant le progrès des choses aurait au contraire exigé de nouvelles ressources. La désharmonie de l’empire anglais n’avait jamais été plus loin. Cet empire se composait de populations qui toutes s’étaient fait la guerre avant d’être réunies sous un même joug. La Normandie ennemie de l’Angleterre avant Guillaume, la Bretagne ennemie de la Normandie, et l’Anjou ennemi du Poitou, le Poitou qui réclamait sur tout le Midi les droits de duché d’Aquitaine, tous maintenant se trouvaient ensemble, bon gré mal gré. Sous les règnes précédents, le roi d’Angleterre avait toujours pour lui quelqu’une de ces provinces continentales. Le Normand Guillaume et ses deux premiers successeurs purent compter sur la Normandie, Henri II sur les Angevins, ses compatriotes ; Richard Cœur-de-

  1. « Londonias quoque venderem si emptorem idoneum invenirem. » (Guill. Neubrig.)
  2. Roger de Hoveden.