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HISTOIRE DE FRANCE

baptisé du nom national d’Arthur. Les Aquitains favorisaient sa cause. La vieille Éléonore seule tenait contre son petit-fils pour Jean son fils, pour l’unité de l’empire anglais que l’élévation d’Arthur aurait divisé[1]. Arthur en effet faisait bon marché de cette unité : il offrait au roi de France de lui céder la Normandie, pourvu qu’il eût la Bretagne, le Maine, la Touraine, l’Anjou, le Poitou et l’Aquitaine. Jean eût été réduit à l’Angleterre. Philippe acceptait volontiers, mettait ses garnisons dans les meilleures places d’Arthur, et, n’espérant pas s’y maintenir, il les démolissait. Le neveu de Jean, trahi ainsi par son allié, se tourna de nouveau vers son oncle ; puis revint au parti de la France, envahit le Poitou et assiégea sa grand’mère Éléonore dans Mirebeau. Ce n’était pas chose nouvelle dans cette race de voir les fils armés contre leurs parents. Cependant Jean vint au secours, délivra sa mère, défit Arthur et le prit avec la plupart des grands seigneurs de son parti. Que devint le prisonnier ? c’est ce qu’on n’a bien su jamais. Mathieu Paris prétend que Jean, qui l’avait bien traité d’abord, fut alarmé des menaces et de l’obstination du jeune Breton ; « Arthur disparut, dit-il, et Dieu veuille qu’il en ait été autrement que ne le rapporte la malveillante renommée ! » Mais Arthur avait excité trop d’espérances pour que l’imagination des peuples se soit résignée à cette incertitude. On assura que Jean l’avait fait périr. On ajouta bientôt qu’il l’avait tué de

  1. Au fait, l’Aquitaine était son héritage, et elle avait transféré ses droits à Jean.