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LUTTE DES DEUX PARTIS. — CABOCHIENS

il s’était acquis beaucoup de gens ; il était bien apparenté, bien allié. Frère de l’archevêque de Sens, il venait de prendre une forte position populaire dans Paris en y faisant son frère évêque. Aussi les princes menèrent l’affaire à petit bruit. Ils s’assemblèrent secrètement à Saint-Victor, délibérèrent sous le sceau du serment ; ils conspirèrent, trois ou quatre princes du sang et les plus grands seigneurs de France, contre le fils du notaire. On avertit Montaigu ; mais il s’obstina à ne rien craindre. N’avait-il pas pour lui le roi, le bon duc de Berri, la reine surtout, en mémoire du duc d’Orléans ? La reine s’employa, il est vrai, un peu en sa faveur. Mais il ne fallut pas grande violence pour lui forcer la main ; on lui promit que les grands biens de Montaigu seraient donnés au dauphin[1]. Après tout, elle était absente, à Melun ; ce triste spectacle de la mort d’un vieux serviteur ne devait pas affliger ses yeux.

Il y eut à la mort de Montaigu une chose qu’on ne voit guère à la chute des favoris : le peuple se souleva[2]. Montaigu, il est vrai, intéressait les trois puissances de la ville : il était frère de l’évêque ; il réclamait le privilège de cléricature, celui du clergé et de l’Université ; enfin, il en appelait au parlement. Rien ne lui servit. La ville était pleine des gentilshommes du duc de Bourgogne. Le nouveau prévôt de Paris, Pierre Desessarts, monta à cheval, courut les rues avec une forte troupe, criant qu’il tenait les traîtres

  1. Bibliothèque royale, mss., Dupuy, vol. 744. Fontanieu, 107-108, ann. 1409.
  2. Le Religieux.