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LUTTE DES DEUX PARTIS. — CABOCHIENS

d’exactions injustes peut et doit être déposé. Cette parole est réprouvée ; mais ne croyez pas qu’elle tombe. Des pensées inconnues fermentent. C’est vers cette époque, ce semble, qu’au front même de la cathédrale de Chartres, témoin de l’humiliation des princes, on sculpte une figure nouvelle, celle de la Liberté[1] ; liberté morale, sans doute, mais l’idée de la liberté politique s’y mêle et s’y ajoute peu à peu.

Le duc de Bourgogne était bien indigne d’être le représentant du principe moderne. Ce principe ne se démêle en lui qu’à travers la double laideur du crime et des contradictions. Le meurtrier vient parler d’ordre, de réforme et de bien public ; il vient attester les lois, lui qui a tué la loi ; nous allons pourtant voir paraître, sous les auspices de cet odieux parti, la grande ordonnance du quinzième siècle.

Autre bizarrerie. Ce prince féodal, qui vient, à la tête d’une noblesse acharnée, d’exterminer la commune de Liège, puise dans cette victoire même la force qui relève la commune de Paris ; là-bas prince des barons, ici prince des bouchers.

Ces contradictions font, nous l’avons dit, la laideur du siècle, celle surtout du parti bourguignon. Le chef, au reste, parut comprendre que, quoi qu’il eût fait, il n’avait rien fait lui-même, qu’il ne pouvait pas grand’chose. Lorsque l’Université proposa de tirer des trois États des gens sages et non suspects pour

  1. App. 126.