Page:Michelet - OC, Histoire de France, t. 4.djvu/20

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
12
HISTOIRE DE FRANCE

une ordonnance du feu roi, qui réservait la garde de son fils au duc de Bourgogne et au duc de Bourbon, son oncle maternel. Charles VI devait être immédiatement couronné[1].

Une autre difficulté, c’est que, si le pays s’était un peu refait vers la fin du règne de Charles V, il n’y avait pas plus d’ordre ni d’habileté en finances ; le peu d’argent qu’on levait mettait le peuple au désespoir, et le roi n’en profitait pas.

On se plaisait à croire que le feu roi avait un moment aboli les nouveaux impôts pour le remède de son âme. On crut ensuite qu’ils seraient remis par le nouveau roi, comme joyeuse étrenne du sacre. Mais les oncles menèrent leur pupille droit à Reims, sans lui faire traverser les villes, de crainte qu’il n’entendît les plaintes. On lui fit même, au retour, éviter Saint-Denis, où l’abbé et les religieux l’attendaient en grande pompe ; on l’empêcha de faire ses dévotions au patron de la France, comme faisaient toujours les nouveaux rois.

La royale entrée fut belle ; des fontaines jetaient du lait, du vin et de l’eau de rose. Et il n’y avait pas de pain dans Paris. Le peuple perdit patience. Déjà, tout autour, les villes et les campagnes étaient en feu. Le prévôt crut gagner du temps en convoquant les

  1. Les trois oncles de Charles VI étaient tout aussi ambitieux et avares que les oncles de Richard II. Il leur fallait aussi des couronnes. En France même, le trône pouvait vaquer. Les jeunes enfants du maladif Charles V pouvaient suivre leur père. La devise du duc de Berri, telle qu’on la lisait dans sa belle chapelle de Bourges, indiquait assez ces vagues espérances : « Oursine, le temps venra ! » App. 6.