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HISTOIRE DE FRANCE

croyant utile de faire un exemple pour une si longue résistance, voulait les avoir à merci. Les Rouennais qui savaient ce que c’était que la merci d’Henri V, prirent la résolution de miner un mur, et de sortir par là la nuit les armes à la main, à la grâce de Dieu. Le roi et les évêques réfléchirent, et l’archevêque de Cantorbéry vint lui-même offrir une capitulation : 1o La vie sauve, cinq hommes exceptés[1] ; ceux des cinq qui étaient riches ou gens d’Église se tirèrent d’affaire ; Alain Blanchard paya pour tous ; il fallait à l’Anglais une exécution, pour constater que la résistance avait été rébellion au roi légitime. 2o Pour la même raison, Henri assura à la ville tous les privilèges que les rois de France, ses ancêtres, lui avaient accordés, avant l’usurpation de Philippe-de-Valois. 3o Mais elle dut payer une terrible amende, trois cent mille écus d’or, moitié en janvier (on était déjà au 19 janvier[2]), moitié en février. Tirer cela d’une ville dépeuplée, ruinée[3], ce n’était pas chose facile. Il y avait à parier que ces débiteurs insolvables feraient plutôt cession de biens, qu’ils se sauveraient tous de la ville, et que le créancier se trouverait n’avoir pour gage que des maisons croulantes. — On y pourvut ; la ville fut contrainte par corps ; tous les habitants consignés jusqu’à parfait payement. Des gardes étaient mis aux portes ; pour sortir, il fallait montrer un billet qu’on achetait fort cher[4].

  1. App. 199.
  2. App. 200.
  3. L’entrée magnifique du vainqueur, au milieu de ces ruines, fit un contraste cruel. L’honnête et humain M. Turner en est lui-même blessé.
  4. Monstrelet.