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HENRI V

deux puissances maritimes. Dès lors la Guyenne[1], l’Angleterre même, étaient en péril. Naguère les Castillans, conduits par un Normand, amiral de Castille, avaient gagné sur les Anglais une grande bataille navale[2]. Leurs vaisseaux devaient sans difficulté, ou ravager les côtes d’Angleterre, ou tout au moins aller en Écosse chercher les Écossais et les amener comme auxiliaires au dauphin.

Henri V voyait si peu son danger du côté du dauphin, de l’Écosse et de l’Espagne, qu’il ne craignit pas de mécontenter le duc de Bourgogne. Celui-ci, misérablement dépendant des Anglais pour les trêves de Flandre, avait essayé de fléchir Henri. Il lui demanda une entrevue, et lui proposa d’épouser une fille de Charles VI, avec la Guyenne et la Normandie ; mais il voulait encore la Bretagne comme dépendance de la Normandie, et de plus le Maine, l’Anjou et la Touraine. Le duc de Bourgogne n’avait pas craint d’amener à cette triste négociation la jeune princesse, comme pour voir si elle plairait. Elle plut, mais l’Anglais n’en fut pas moins dur, moins insolent ; cet homme, qui ordinairement parlait peu et avec mesure, s’oublia jusqu’à dire : « Beau cousin, sachez que nous aurons la fille de votre roi, et le reste, ou que nous vous mettrons, lui et vous, hors de ce royaume[3]. »

Le roi d’Angleterre ne voulait pas traiter sérieusement ; et le duc de Bourgogne avait près de lui des

  1. App. 203.
  2. Le Normand Robert de Braquemont, amiral de Castille. (Le Religieux.) App. 204.
  3. Monstrelet.