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HENRI V

tout cela, il s’obstina d’y aller ; la dame de Giac, qui ne le quittait point, le voulut ainsi[1].

Le duc tardant à venir, Tannegui Duchâtel alla le chercher. Le duc n’hésita plus ; il lui frappa sur l’épaule, en disant : « Voici en qui je me fie. » Duchâtel lui fit hâter le pas ; le dauphin, disait-il, attendait ; de cette manière il le sépara de ses hommes, de sorte qu’il entra seul dans la galerie avec le sire de Navailles, frère du captal de Buch, qui servait les Anglais et venait de prendre Pontoise. Tous deux y furent égorgés (10 septembre 1419).

L’altercation qui eut lieu est diversement rapportée. Selon l’historien ordinairement le mieux informé, les gens du dauphin lui auraient dit durement : « Approchez donc enfin, monseigneur, vous avez bien tardé[2] ! » À quoi il aurait répondu que « c’était le dauphin qui tardait à agir, que ses lenteurs et sa négligence avaient fait bien du mal dans le royaume ». Selon un autre récit, il aurait dit qu’on ne pouvait traiter qu’en présence du roi, que le dauphin devait y venir ; le sire de Navailles, mettant la main sur son épée, de l’autre saisissant le bras du jeune prince, aurait crié, avec la violence méridionale de la maison de Foix : « Que vous le veuillez ou non, vous y viendrez, monseigneur. » Ce récit, qui est celui des dau-

  1. Le trahit-elle ? Tout le monde le crut quand, après l’événement, on la vit rester du côté du dauphin. Pourtant elle avait perdu, par la mort de Jean-sans-Peur, l’espoir d’une grande fortune. Innocente ou coupable, qu’aurait-elle été chercher en Bourgogne ? la haine de la veuve, toute-puissante sous son fils ?
  2. « Tardavistis… tardavistis… » (Religieux.)