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HISTOIRE DE FRANCE

mille hommes[1]. La ville désarmée, on résolut de la serrer entre deux forts ; on acheva la Bastille Saint-Antoine, et l’on bâtit au Louvre une grosse tour qui plongeait dans l’eau ; on croyait qu’une fois pris dans cet étau, Paris ne pourrait plus bouger.

Alors commencèrent les exécutions. On mit à mort les plus notés, les violents[2] ; puis d’honnêtes gens qui les avaient contenus et qui avaient rendu les plus grands services, comme le pauvre Desmarets[3]. On ne lui pardonna pas de s’être mis entre le roi et la ville. Après quelques jours d’exécutions et de terreur, on arrangea une scène de clémence. L’Université, la vieille duchesse d’Orléans, avaient déjà demandé grâce ; mais le duc de Berri avait répondu que tous les bourgeois méritaient la mort. Enfin on dressa, au plus haut des degrés du Palais, une tente magnifique, où le jeune roi siégea avec ses oncles et les hauts barons. La foule suppliante remplissait la cour. Le chancelier énuméra tous les crimes des Parisiens depuis le roi Jean, maudit leur trahison, et demanda quels supplices ils n’avaient pas mérités. Les malheureux voyaient déjà la foudre tomber et baissaient les épaules ; ce n’était que cris, des femmes surtout qui avaient leurs

  1. Cette exagération prouve seulement l’idée qu’on se formait déjà de la population de cette grande ville. (Religieux de Saint-Denis.)
  2. Le lundi qui suivit la rentrée du roi, on exécuta un orfèvre et un marchand de drap, plusieurs autres dans la quinzaine suivante, parmi lesquels Nicolas le Flamand, un des amis d’Étienne Marcel, qui avait assisté au meurtre de Robert de Clermont.
  3. On prétend qu’à sa mort il refusa de dire merci au roi, et dit seulement merci à Dieu. Il était l’auteur d’un Recueil de décisions notoires, établies par enquestes, par tourbes, de 1300 à 1387.