Page:Michelet - OC, Histoire de France, t. 4.djvu/41

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
33
JEUNESSE DE CHARLES VI

expéditions n’avaient pas mieux tourné. La France avait envahi l’Italie, menacé l’Angleterre, touché l’Allemagne. Elle avait fait de grands mouvements, elle avait fatigué et sué, et il ne lui en restait rien. Elle n’était pas heureuse ; rien ne venait à bien. Le roi, gâté de bonne heure par la bataille de Roosebeke, avait cru tout facile, et il ne rencontrait que des obstacles[1]. À qui pouvait-il s’en prendre, sinon à ceux qui l’avaient jeté dans les guerres ? À ses oncles, qui l’avaient toujours conseillé à son dam et à leur profit.

Les pacifiques conseillers de Charles V prévalurent à leur tour, le sire de La Rivière, l’évêque de Laon, Montaigu et Clisson. Charles VI, tout enfant qu’il était, avait toujours aimé ces hommes. Il avait obtenu de bonne heure que Clisson fût connétable. Il avait sauvé la vie au doux et aimable sire de La Rivière, que ses oncles voulaient perdre. La Rivière était l’ami et le serviteur personnel de Charles V ; il a été enterré à Saint-Denis, aux pieds de son maître.

Le roi avait atteint vingt et un ans. Mais les oncles avaient le pouvoir en main : il fallait de l’adresse pour le leur ôter. L’affaire fut bien menée[2]. Au retour de leur triste expédition de Gueldre, un grand conseil fut assemblé à Reims, dans la salle de l’archevêché. Le

  1. Une expédition sollicitée par les Génois et commandée par le duc de Bourbon alla échouer en Afrique (1390). Le comte d’Armagnac, ramassant tous les soldats qui pillaient la France, passa les Alpes, attaqua les Visconti et se fit prendre (1391). Le roi lui-même projetait une croisade d’Italie ; il aurait établi le jeune Louis d’Anjou à Naples, et terminé le schisme par la prise de Rome.
  2. App. 26.