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LE DUC D’ORLÉANS, LE DUC DE BOURGOGNE

léans, Valentina Visconti, sa femme, sa triste veuve, et elle mourut de sa mort. L’autre, Isabeau de Bavière (Visconti du côté maternel) fut sa belle-sœur, son amie, peut-être davantage. La troisième, dans un rang bien modeste, la chaste, la savante Christine[1], n’eut avec lui d’autre rapport que les encouragements qu’il donna à son aimable génie[2].

L’Italie, la Renaissance, l’art, l’irruption de la fantaisie, il y avait dans tout cela de quoi séduire et de quoi blesser. Ce jour du seizième siècle, qui éclatait brusquement dès la fin du quatorzième, dut effaroucher les ténèbres. L’art n’était-il pas une coupable contrefaçon de la nature ? Celle-ci n’a-t-elle pas assez de danger, assez de séduction, sans qu’une diabolique adresse la reproduise encore pour la perdition des âmes ? Cette perfide Italie, la terre des poisons et des maléfices, n’est-ce pas aussi le pays de ces miracles du Diable ?

C’étaient là les propos du peuple, ce qu’il disait tout haut. Joignez-y le silence haineux des scolastiques, qui voyaient bien que peu à peu il leur fallait céder la place. Derrière, appuyaient la foule des esprits secs et étroits, qui demandent toujours : À quoi bon ?… À quoi bon un tableau du Giotto, une miniature du beau Froissart, une ballade de Christine ?

De tels esprits sont toujours un grand peuple. Mais alors ils avaient pour eux un grave et puissant auxi-

  1. Christine de Pisan semble avoir commencé la suite des femmes de lettres, pauvres et laborieuses, qui ont nourri leur famille du produit de leur plume. App. 58.
  2. App. 59.