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4G HISTOIRE DE FRANCE

En revanche, l’erreur est féconde. Le peuple des hommes d’erreur, des bavards et des fripons, astrologues et alchimistes, va multipliant. Les mathématiciens, sérieux au douzième siècle, du temps de Fibonacci et de l’école de Pise, sont des sorciers au quatorzième, des faiseurs de carrés magiques. Charlemagne avait une horloge qu’il avait reçue du calife ; mais saint Louis, qui revient d’Orient, n’en a pas et mesure ses nuits par la durée d’un cierge. La chimie, féconde chez les Arabes d’Espagne et prudente encore chez Roger Bacon, devient l’art de perdre l’or, de l’enterrer au creuset pour en tirer de la fumée. La reculade que nous notions en philosophie, en littérature, se fait plus magnifique encore et plus triomphante dans les sciences. Gopernik, Harvey, Galilée, sont ajournés pour trois cents ans. Une nouvelle porte solide ferme le passage au progrès, porte épaisse, porte massive ; la création d’un monde de bavards qui jasent de la nature sans s’en occuper jamais.

Bonne légion de renfort pour l’armée immense des sots.

§ VIII. — Prophétie de la Renaissance. — Évangile éternel.

La Renaissance s’était présentée au douzième siècle comme la sibylle à cet ancien roi de Rome, les mains toutes pleines d’avenir, chargées des livres du destin ; il hésite ; de cinq volumes, elle en brûle deux, et pour trois demande le même prix que pour cinq. Il