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NTRODUCTION 81

§ XIII. — La sorcellerie. — Résumé.

Le bon moine allemand Sprenger, qui a écrit le Marteau des sorcières, manuel fameux de l’inquisition, se demande pourquoi il y a si peu de sorciers et tant de sorcières, pourquoi le Diable s’entend mieux avec les femmes. A cette question il trouve vingt réponses savamment sottes : c’est que la femme a’ perdu l’homme, c’est qu’elle a la tête légère, qu’elle a en elle (Salomon l’assure) un abîme de sensualité, etc., etc. Il y a d’autres raisons, plus simples et plus vraies peut-être.

La femme, en ce temps bizarre, idéalement adorée en remplaçant Dieu sur l’autel, est clans la réalité la victime de ce monde sur laquelle tous les maux retombent, et elle a l’enfer ici-bas. Boccace, dans sa Griselidis, ne dit qu’une histoire trop commune, la dureté insouciante de l’homme pour le pauvre cœur maternel. L’homme se résignant pieusement aux maux qui frappent la femme, il résulte de son imprévoyance une fécondité immense, balancée par une immense mortalité d’enfants. La femme, jouet misérable, toujours mère, toujours en deuil, ne concevait qu’en disant (dit Sprenger) : « Le fruit soit au Diable ! » Vieille à trente ou quarante ans, survivant à ses enfants, elle restait sans famille, négligée, abandonnée. Et dans sa famille même, au dur foyer du paysan, quelle place a la vieille ? Le dernier des serviteurs, le petit berger, est placé plus haut. On lui