Page:Michelet - OC, Histoire de la Révolution française, t. 1.djvu/278

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À quoi Mirabeau ajoute une effrayante sortie. S’adressant aux députés que l’on envoyait au roi : « Eh bien, dites au roi que les hordes étrangères dont nous sommes investis ont reçu hier la visite des princes et des princesses, des favoris et des favorites, et leurs caresses, et leurs exhortations, et leurs présents. Dites-lui que, toute la nuit, ces satellites étrangers, gorgés de vin et d’or, ont prédit, dans leurs chants impies, l’asservissement de la France, et que leurs vœux brutaux invoquaient la destruction de l’Assemblée nationale. Dites-lui que, dans son palais même, les courtisans ont mêlé leurs danses au son de cette musique barbare, et que telle fut l’avant-scène de la Saint-Barthélemy !… Dites-lui que ce Henri dont l’univers bénit la mémoire, celui de ses aïeux qu’il affectait de vouloir prendre pour modèle, faisait passer des vivres dans Paris révolté, qu’il assiégeait en personne, et que ses féroces conseillers font rebrousser les farines que le commerce apporte dans Paris affamé et fidèle. »

La députation sortait. Mais voilà que le roi arrive : il entre, sans gardes, avec ses frères. Il fait quelques pas dans la salle, et debout, en face de l’Assemblée, il annonce qu’il a donné ordre aux troupes de s’éloigner de Paris et de Versailles, et il invite l’Assemblée à en avertir Paris… Triste aveu ! que sa parole obtiendra peu de créance, si l’Assemblée n’assure que le roi n’a pas menti !… Il ajouta pourtant un mot plus noble, plus habile : « On a osé publier que vos personnes n’étaient pas en sûreté. Serait-il donc