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demandes, les dons, les plaintes. Son étroite enceinte était comme la maison de la France. Les pauvres surtout donnaient. C’était un jeune homme qui envoyait ses économies, six cents livres péniblement amassées. C’étaient des pauvres femmes d’artistes qui apportaient ce qu’elles avaient, leurs bijoux, la parure qu’elles reçurent au mariage. Un laboureur venait déclarer qu’il donnait telle quantité de blé. Un écolier offrait telle collection que lui envoyaient ses parents, ses étrennes peut-être, sa petite récompense… Dons d’enfants, de femmes, générosité du pauvre, denier de la veuve, petites choses, et si grande devant la patrie ! devant Dieu !

L’Assemblée, parmi les ambitions, les dissidences, les misères morales qui la travaillaient, était émue, soulevée au-dessus d’elle-même par cette magnanimité du peuple. Lorsque M. Necker vint exposer la misère, le dénuement de la France, et solliciter, pour vivre au moins deux mois encore, un emprunt de trente millions, plusieurs députés demandèrent qu’il fût garanti par leurs propres biens, par ceux des membres de l’Assemblée. M. de Foucault, en vrai gentilhomme, fit la première proposition, il offrit d’y engager six cent mille livres qui faisaient toute sa fortune.

Un sacrifice plus grand encore qu’aucun sacrifice d’argent, c’est celui que tous, riches et pauvres, faisaient à la chose publique, celui de leur temps, de leur pensée constante, de toute leur activité. Les municipalités qui se formaient, les administrations