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« Je suis ! dit-elle à tous les peuples ; ô mes frères, vous serez aussi ! »

Ce fut sa glorieuse erreur, sa faiblesse, touchante et sublime : la Révolution, il faut l’avouer, commença par aimer tout.

Elle alla jusqu’à aimer son ennemi, l’Angleterre.

Elle aima, s’obstina longtemps à sauver la royauté, la clé de voûte des abus qu’elle venait démolir. Elle voulait sauver l’Église ; elle tâchait de rester chrétienne, s’aveuglant volontairement sur la contradiction du vieux principe, la Grâce arbitraire, et du nouveau, la Justice.

Cette sympathie universelle, qui d’abord lui fît adopter, mêler indiscrètement tant d’éléments contradictoires, la menait à l’inconséquence, à vouloir et ne pas vouloir, à faire, défaire en même temps. C’est l’étrange résultat de nos premières Assemblées.

Le monde a souri sur cette œuvre ; qu’il n’oublie pas cependant que ce qu’elle eut de discordant, elle le dut en partie à la sympathie trop facile, à la bienveillance indistincte qui fît le premier caractère de notre Révolution.

Génie profondément humain ! j’aime à le suivre, à l’observer dans ces admirables fêtes où tout un peuple, à la fois acteur et témoin, donnait, recevait l’élan de l’enthousiasme moral, où chaque cœur grandissait de toute la grandeur de la France, d’une Patrie qui, pour son droit, proclamait le droit de l’Humanité.

À la fête du 14 juillet 1792, parmi les saintes