Page:Michelet - OC, Histoire de la Révolution française, t. 4.djvu/18

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dans les plus violents royalistes des bataillons connus pour leur royalisme, des Filles-Saint-Thomas, des Petits-Pères et de la Butte-des-Moulins. Les noms de traître et de Judas se disaient très haut autour du maire de Paris. Il montra son flegme ordinaire. Il arriva sans encombre aux appartements du roi, tout remplis de monde et sombres, à ce même appartement où, le soir du 21 juin, Louis XVI lui avait parlé si durement ; le même dialogue, s’il se fût reproduit la nuit du 10 août, eût été pour Pétion un arrêt de mort. Il y avait là beaucoup de gentilshommes à visage pâle, que la vue seule du maire de Paris agitait d’une sorte de tremblement nerveux. Mandat, le commandant de la garde nationale, sans trop calculer s’il ne risquait pas de faire poignarder Pétion, lui fit subir cette espèce d’interrogatoire : « Pourquoi les administrateurs de la police de la ville avaient distribué des cartouches aux Marseillais ? Pourquoi lui, Mandat, pour chacun de ses gardes nationaux, n’avait reçu que trois cartouches ?… » — La cour, fort défiante pour la garde nationale, n’avait pas exigé qu’elle fût mieux pourvue de munitions. En revanche, chacun de ses Suisses avait quarante coups à tirer.

Pétion, sans s’étonner, répondit avec l’air froid qui lui était ordinaire : « Vous avez demandé de la poudre ; mais vous n’étiez pas en règle pour en avoir. » La réponse n’était pas trop bonne ; c’était le maire lui-même, Pétion, qui devait faire décider la chose par la municipalité, donner pouvoir au