Page:Michelet - OC, Histoire de la Révolution française, t. 4.djvu/331

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qui les eût crues aurait jugé Paris. Danton et la Montagne prirent le crime à leur compte, ils dirent audacieusement au côté droit : « N’en parlez plus ; c’est nous qui l’avons fait. »

Les nouveaux représentants apportaient de leurs départements la terreur de septembre. Les récits du funèbre événement, surchargés d’incidents atroces, avaient été colportés par les ennemis de la Révolution, avidement saisis par les provinciaux. Leur envie pour Paris les rend toujours crédules. Ils crurent sans difficulté aux douze mille morts que les royalistes mettaient dans leurs romans. Tous ceux qui arrivaient étaient conduits par d’officieux guides de prison en prison ; on leur montrait à l’Abbaye (on le montra à mon père comme à d’autres provinciaux) une trace de sang à douze pieds de haut ; le sang avait monté, disait-on, au premier étage. Même exagération sur le nombre des meurtriers. Les uns disaient dix mille, d’autres cent mille, etc. La capitale tout entière avait coopéré au massacre. Ce n’était pas sans effroi que les conventionnels arrivaient à Paris, entraient dans la ville sanglante ; tout leur paraissait sombre, tous les murs couverts de crêpe et de deuil.

L’immense majorité de ces nouveaux représentants arrivaient l’esprit inquiet, flottant, saisissable aux premières impressions. La Convention avait été élue sous le coup de la nouvelle de septembre, sous l’émotion qu’en eut la France. Elle sortit tout entière de la bourgeoisie. Il y eut même quelques