Page:Michelet - OC, Histoire de la Révolution française, t. 4.djvu/365

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septembre se soient mêlés, dans ces imaginations malades, avec la fameuse histoire du Vieux de la Montagne et des Assassins. Selon eux, dès 1789, un vaste système de crimes avait été conçu au profit de la Maison d’Orléans. Par qui ? Le profond inventeur était, selon eux, Laclos (le futile auteur des Liaisons dangereuses). La Fayette et Mirabeau, unis entre eux intimement (!), avaient été les agents du complot ; ils avaient envoyé Orléans en Angleterre pour arranger tout avec Pitt. « Danton, Marat, les Cordeliers, qui dressent au meurtre l’armée des septembriseurs, égorgeront un matin le côté droit tout entier, feront roi le duc d’York. Orléans assassinera cet Anglais, mais sera assassiné par Marat, Danton, Robespierre. Lequel restera des trois ? Le plus habile, qui tuera les deux autres, sera roi… Ce sera Danton. »

Ce terrible échafaudage de folies n’étonnait personne. On le jugeait vraisemblable, et chacun, en y rêvant, trouvait bien quelque fait à l’appui qui le rendait tout à fait sûr. Si quelqu’un des Girondins contestait, c’était pour établir un autre roman, non moins absurde. Le seul qui gardât sa tête froide et fit des objections, était Condorcet ; mais on ne l’écoutait guère.

Ce qui était vrai et positif, c’est que Danton, en lâchant le ministère, n’avait rien lâché ; il ne gardait aucun titre, mais tout ce qu’il y avait de force dans la grande dissolution s’était instinctivement concentré autour de lui. Il conservait les fils de la diplomatie et de la police ; il semblait tenir Paris et tenir